Un humanisme et une quête de la vérité que Robert Redford persiste à raconter et à décortiquer dans ce nouveau volet. Entouré d’acteurs normalement à la pointe, Stanley Tucci, Susan Sarandon, Chris Cooper ou encore Julie Christie, il raconte le destin des membres de la Weather Underground, un groupuscule de défenseurs des libertés qui, en 1969, avait lancé une série d’attentats pour protester contre la guerre au Viêt Nam. Certains furent arrêtés par le FBI, d’autres réussirent à s’échapper et à rentrer dans l’anonymat. Près de 50 ans plus tard, et malgré une méfiance de tous les instants, ces rescapés se retrouvent à nouveau poursuivis par le gouvernement qui les somment de répondre de leurs actes. L’arrestation musclée de Sharon Solarz, l’une d’entre eux, laisse présager d’un bon film d’action intelligent et réaliste à base de mises sur écoute, traques et échanges de coups de feu et de poings. Il n’en sera rien.
Sous surveillance signe le retour d’un Robert Redford qui devrait prendre enfin conscience de ses limites. Son jeu de jambes tremblant en pleine course-poursuite au cœur d’une forêt humide – il reprend son souffle à chaque dénivelé – ôte toute crédibilité à son personnage, sans parler de sa paternité tardive, rendue peu vraisemblable par le scénario. Cet avocat de 77 ans, qui a tout de même gardé son charisme et son charme, retrouve au cours de sa fuite une ancienne conquête et camarade de bombes, Mimi Lurie. Tous deux, cachés dans une cabane, se remémorent le passé. Le spectateur échappe alors de peu à une scène érotique. Même Robert Redford semble avoir voulu surfer sur ce glissement sexuel sans jamais vraiment choisir son camp.
Parmi ces retraités peu convaincants qui repartent contre leur gré en guerre contre un gouvernement tenace, Shia Labeouf amène un peu de fraîcheur et dépoussière le scénario. Il est plaisant de le voir enfin dans un rôle plus sérieux et intellectuel l’éloignant de ses Transformers (Michael Bay, 2007 ; 2009 et 2011) adorés. L’acteur interprète Ben Shepard, un jeune loup aux lunettes vintage et besace en bandoulière, correspondant au cliché près au journaliste d’investigation. On voit facilement en lui le Will Tinpin (Bradley Cooper) créé par J. J. Abrams pour sa célèbre série Alias (2001-2006) : un homme d’une trentaine d’années dont le besoin d’adrénaline et de reconnaissance de la part de son rédacteur en chef le poussent à prendre des risques, à ronger l’os du complot jusqu’à la moelle pour se sentir vivant. Tel une fouine, Ben Shepard est malin et use de sa ruse pour faire craquer les témoins un par un, déterrer les secrets et faire vaciller l’histoire vers un tout autre dénouement. Son obstination, loin de le mettre en danger – il serait bon de le voir perler un peu plus -, lui permettra inconsciemment de se porter caution de l’ennemi qu’il croyait traquer, l’innocent Jim Grant.
Confrontés au passé et aux décisions qu’ils ont prises, les derniers membres libres de la Weather Underground s’engagent dans ce qui semble être davantage une promenade de santé qu’une course-poursuite haletante. Robert Redford a choisi d’opter pour un scénario qui, dans un premier temps, apparaît comme lourd et cérébral mais que l’on découvre en réalité truffé de raccourcis qui finissent par perdre et ennuyer. D’un semblant de film d’action, Sous surveillance devient un film d’enquête mené d’une main de maître par le crédible Shia Labeouf, qui efface et amenuise le jeu de Robert Redford, ce dernier n’utilisant pas toutes les capacités de jeu du jeune prodige. N’arrivant plus à la cheville d’un Tom Cruise ou d’un Daniel Craig, il cherche tant bien que mal à s’aligner mais n’y arrive définitivement pas. Le réalisateur et acteur, à vouloir trop en faire, ne pose ses valises nulle part.