Mais avec Song to Song, son cinéma semble atteindre ses limites. Casting de rêve, caméra de Lubezski hyper-sensible et très mobile, montage éclaté : la recette a beau vendre encore de la beauté, mais, précisément, elle se montre en tant que recette. Comme si Malick arrivait au bout d’un système, et qu’il était grand temps de franchir un nouveau cap.
Un film de stars
La mise en scène aurait néanmoins pu se montrer critique à l’égard de ces rôles caricaturaux. Au lieu de cela, elle se contente de figer ces derniers dans une forme d’éternité dorée, à base de soleil texan et de musique pop. Le comble du comble se trouvant lors d’une séquence à la plage, où l’on contemple d’un œil mi-figue mi-raisin Fassbender poursuivre Mara en imitant un chimpanzé ; on croirait regarder Les vacances de Fassie à la plage.
La poésie en panne
Sur le plan du montage, cela passait par la fragmentation des corps, rarement vus en entiers, et souvent entraperçus à travers des plans serrés sur des parties excentrées, ainsi que par une mise en circulation des visages au sein d’un plus vaste tourbillon d’images. Au sein de ce dernier se rencontraient, dans un montage résolument anti-narratif, des visages, des lueurs, des végétaux, de l’eau… tout un ensemble d’éléments arrachés à leur milieu d’origine et recomposés dans la grande alchimie cinématographique.
Quelques échappées pareilles égrainent Song to Song. Et ces discrètes odes à la vie évitent au film de sombrer. Mais dans l’ensemble, elles se font plus rares, car l’alchimie poétique marque l’arrêt. Au lieu de fragmenter comme dans ses derniers films, Malick choisit de revenir à une forme plus pleine, où la narration se fait légèrement plus présente. Le film se focalise ainsi sur les visages des stars, systématiquement captés en gros plans ; le montage ne renvoyant plan après plan qu’à des figures vues et revues, se réduit l’ouverture poéthique au monde. On pourrait appeler ceci le « starocentrisme », soit la réduction de la richesse du monde à une poignée d’icônes contemporaines.
Se révèle alors la structure du film : un simple cabotinage de stars, sous couvert d’une esthétique vaguement expérimentale.