Les deux films ont au moins en commun de traiter d’un sujet essentiel, résumé parfaitement par une formule d’Alfred Hitchock : « boy meets girl ». Lui, c’est Ewan McGregor, un cuisinier un peu anonyme, spécialisé dans les petits plats et les rencontres sans lendemain. Elle, c’est Eva Green, une scientifique qui fronce souvent les sourcils et qui aime elle aussi coucher le premier soir sans laisser de numéro. Ces deux-là s’attirent, se sourient, finissent au lit dans des scènes d’une sensualité aussi crue que bancale. On pourrait s’arrêter là et y broder une jolie romance à Glasgow : certains ont fait des films avec moins que ça.
Contagion dans tous les sens
La « grande » idée de Mackenzie, c’est d’accoler à l’histoire d’amour entre ces deux handicapés sociaux une histoire d’apocalypse des sens, aussi soudaine et farfelue qu’implacable. L’un après l’autre, l’Homme perd ces cinq sens, d’abord temporairement, puis pour toujours. Difficile de cuisiner quand personne n’a plus de goût ni d’odorat, ce qui nous vaut de savoureuses séquences « pourquoi pas ? » où, entre autres, Eva Green mange du savon dans son bain ; ou bien détestables, lorsqu’il tente de nous faire comprendre que cela pourrait au moins permettre de régler la famine dans le monde. Puis, comme dans un certain Blindness, qui était lui aussi pétri de défauts mais ou Fernando Meirelles y avait les moyens de ses ambitions, le monde perd la vue. Le tout non sans avoir eu des crises de colère et d’hystérie, qui permettent au moins au casting de montrer à Lars Von Trier qu’ils pourront jouer dans son prochain film.
Pour paraphraser les talents culinaires d’Ewan McGregor, il est clair qu’ici la mayonnaise ne prend pas. Parce qu’il envisage le prétexte d’un « film de contagion » comme un outil métaphorique uniquement destiné à illustrer la violence du sentiment amoureux (on n’est pas chez Soderbergh, très clairement), sans pour autant rendre son couple principal attractif ou charismatique (McGregor et Green ne dégagent aucune alchimie et leurs personnages sont à baffer), Mackenzie conduit son œuvre droit dans le mur du ridicule, malgré l’amour manifeste qu’il semble porter aux cuistots (ceux-ci continuent malgré tout leur activité en misant tout sur la présentation de leurs plats… tiens donc !). Inutile également de s’attarder sur les artifices stylistiques cache-misères qui tentent de nous faire « ressentir » la perte de repères de l’humanité, sans jamais nous faire oublier que, dans le genre, d’autres cinéastes sont passés par là avec davantage d’imagination. Un coup pour rien pour Mackenzie, donc. Heureusement, il y a Rock’n’Love.