No Popcorn on the floor

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Voilà un petit documentaire sur les coulisses d´un cinéma indépendant de Bayonne, qui ne manque pas de soulever d´importantes questions sur la distribution du cinéma d´auteur en France et sur la difficulté pour un petit programmateur de survivre face aux multiplexes. La trop grande humilité de la forme limite cependant l´intérêt jusqu´à provoquer un certain ennui. Restent de sympathiques portraits de passionnés qui apportent une complète sincérité au projet.

Quand on pense à Bayonne, c’est d’abord le Rugby, le jambon, les fêtes alcoolisés qui s’y tiennent la première semaine d’août ou les plages des surfeurs de la côte basque qui viennent à l’esprit. Ce documentaire nous rappelle d’abord que, loin de ces clichés réducteurs, il y a aussi des cinéphiles passionnés qui se battent depuis des années pour faire vivre une certaine idée du cinéma. Libérée des blockbusters hollywoodiens débilitants vendus en complément de popcorn et autres sucreries, ce cinéma là offre au spectateur bien plus qu’un simple divertissement : une réflexion sur lui-même, une image du monde, ou un point de vue sur le réel. . Le Cinéma, quoi ! Ces gens se concentrent autour de l’Atalante, une petite salle, la plus vieille du pays basque, sise sur les bord de l’Adour. Belle idée donc que celle de ce film de nous présenter les coulisses de ce cinéma engagé et résistant, et de nous montrer comment fonctionne ce petit monde une fois les portes de la salle fermée. De la gestion financière aux réparations de matériel ou au ménage de la salle, jusqu’à l’acquisition et choix des films et bobines, la caméra de Gaël Mocaër nous dévoile ce sur quoi nous, spectateurs fascinés par l’image projetée, n’avons pas toujours la curiosité de nous interroger, notamment au sujet de la manière dont elle est arrivée là.

Des 480 heures de rush, le cinéaste a conservé une heure et demie de métrage, se concentrant sur deux axes. Le plus réussi décrit avec affection l’équipage à bord de l’Atalante. Les portraits, privilégiant la drôlerie en insistant avec gentillesse sur les bizarreries et les actes manqués de ses modèles, sont attachants et témoignent d’une véritable communion entre le metteur en scène et ses sujets. Mais la gravité n’est pas absente du film à travers la thématique de la désillusion qu’éprouve le jeune directeur du cinéma, Ramuntxo Garbisu. Rêvant de défendre un cinéma sans concession, le programmateur devient peu à peu conscient de l’impossibilité de faire vivre un film difficile, quand les multiplexes méga CGR qui pullulent dans la régions habituent le spectateur à la tranquillité de la consommation de produit faciles à digérer. Cette lutte est bien sûr celle de tout petit artisan qui essaie de survivre quand un gros producteur s’installe à proximité, mais la spécificité du cinéma permet de poser quelques questions passionnantes sur l’accès à la culture, les moyens de faire partager une passion ou les difficultés inhérentes à la promotion d’un cinéma ne bénéficiant pas forcément d’une forte visibilité.

     

Les promesses ne sont malheureusement pas toujours tenues par ce film à la réalisation un peu plate, sans véritables idées ou enjeux cinématographiques, se contentant d’aligner les scènes sans grande inventivité. Le caractère artisanal du sujet ne se prêtait certes pas à une démonstration pyrotechnique, mais l’impression d’assister à un simple reportage télévisuel se fait parfois un peu trop ressentir. L’utilisation excessive des sempiternelles même notes musicales, donnant une atmosphère tranquille et presque élégiaque au début du film, mais devenant exaspérante au bout d’une demi-heure, est assez symptomatique de la lassitude que peut ressentir le spectateur face à ce documentaire flirtant parfois avec l’ennui. Mais surtout, le film échoue aussi à expliciter le processus de désenchantement que connaît son acteur principal, laissant peut-être trop, dans un souci de généralisation du sujet, la cinéphilie de côté. Pourquoi donc ce fan de Star Wars qui dirige le cinéma, voit-il comme une défaite le fait de passer Harry Potter en VO ? Pourquoi Almodovár attire plus les foules que Pour un seul de mes deux yeux ? Pourquoi Brockback Mountain est-il a priori jugé comme un film ennuyeux ? Pourquoi la fidélisation de la clientèle échoue-t-elle in fine ? Et à l’inverse, quels liens unissent ces employés au cinéma, pourquoi défendent-ils cette idée si pure du cinématographe ? Si le film échoue à montrer tout cela, il a tout de même le mérite de poser certaines questions, et l’entreprise, portée par la passion communicative de ses personnages, reste malgré tout fort attachante.

PS : Pour information, si Ramuntxo Garbisu quitte la direction du cinéma à la fin du film, l’Atalante existe encore à Bayonne et se porte plutôt bien puisqu’elle a même ouvert une seconde salle il y a un an. Le combat continue donc !

Titre original : No Popcorn On The Floor

Réalisateur :

Acteurs :

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Durée : 90 mn


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