Alors, qu’est-il donc arrivé à Machete Kills ? Pourquoi baille-t-on au milieu de deux, trois rires ? L’écart entre le premier et le second volet se mesure par la fainéantise avec laquelle Rodriguez peint les personnages secondaires de Machete Kills. Son prédécesseur dressait une série de figures patchworks, punks et bariolés : prêtre fumeur guerrier, post-ado junkie reconvertie en nonne barbare, dealer chicano-samouraï, et cætera, et cætera. Le second récidive, sans génie, et surtout, sans acteur. Lady Gaga amuse deux minutes, Mel Gibson semble franchement perdu et Charlie Sheen nous fait regretter son héros des deux Hot Shots (Jim Abrahams, 1991 et 1993).
Adieu ce respect, humblement distant, vis-à-vis d’un mauvais goût direct-to-video, honorant Steven Seagal d’un rôle magique. Par ses effets kitsch, frontaux et hilarants, Machete se présentait comme un trublion encastrant joyeusement le petit dans le grand écran, Chuck Norris dans Leone. Machete Kills, bien plus frileux, évacue tout ce petit monde, troque ses seconds couteaux de troisième zone pour des visages bien plus glamours, des stars qu’on ne bouscule à aucun moment. C’est la perte prématurée d’un souffle, d’une franchise qui ne tient déjà plus debout. On se marre pourtant à l’idée d’un troisième opus, Machete Kills Again… In Space!, promesse d’une meilleure gestion de l’espace.
Ce qu’il manque à ce Machete Kills, c’est la trajectoire franche de son illustre aîné, ramassé autour de deux territoires mythiques, ramenant dos à dos Histoire et légende, guerre du Mexique et western tardif. Machete Kills flâne sans fixer sa hargne : États-Unis, Mexique, États-Unis, espace… On passe d’un régionalisme poussé et étudié à un mondialisme vague, mal dessiné. Machete tentait, avec toute la pureté rageuse de l’ado punk, de ramener un poil de militantisme dans ce monde apolitique du blockbuster qui tâche. Machete Kills, lui, ne tente plus rien, et c’est bien triste.