I am the future

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Jeunesse et volonté.

Depuis la France, l’Indonésie, l’Inde et le Liban, quatre jeunes s’interrogent sur leur avenir et celui de leur communauté. Des destins croisés qui convergent à New York où ils témoignent de leur expérience de la pauvreté à l’occasion de la journée internationale du refus de la misère organisée aux Nations Unies. Au travers de l’écriture, de la danse, de la photographie et du dessin, les protagonistes posent, avec courage et de joie, un œil rare sur les grands défis contemporains.

 

Le film débute par des attentes, parfois déçues. Les quatre jeunes protagonistes, conviés à New York pour témoigner auprès des membres de l’ONU de leur quotidien et des incidences des crises actuelles (économique, politique, sociale, climatique), ne se rencontreront pas tous. Dian, Laxmi et Soumayraa  apprendront quelques heures avant leur départ vers les USA que Mamamadou n’obtiendra pas de visa pour ce pays. Néanmoins, chacun s’exprimera malgré les obstacles par l’art et même le discours. Grâce à ce documentaire efficacement intitulé I am the future, la cinéaste Rachel Cisinski, accompagnée par le producteur Romain Mailliu, met en valeur et en scène trois filles et un garçon aux continents et aux vies différents, mais dont le point commun consiste en la volonté de sortir de leur condition. Les initiateurs du long-métrage, membres de l’ONG Life Project 4 Youth Alliance, organisation qui stimule des projets professionnels contre l’exclusion et la pauvreté, développent au cours de cette œuvre plusieurs chapitres narratifs et individuels où chacun évoque son existence et sa volonté de changer son avenir par la prise de parole auprès de l’ONU mais aussi par  l’intermédiaire d’un art (scénique, cinématographique, photographique, graphique).

Le premier d’entre ces quatre protagonistes citoyens du monde, Mamadou, a dû fuir la Guinée Conakry en raison de son militantisme politique, en traversant plusieurs contrées avant d’arriver en 2017, à Paris.  Il nous raconte via un scénario pour lequel il est aidé par une jeune fille, son désarroi et sa solitude au cours des premières semaines de sa nouvelle vie.  Ensuite, vient Dian, qui dessine et transforme ainsi sa vie habituelle dans un bidonville de Jakarta entre décharge et montée des eaux, entre labeur familial et résignation souriante de ses proches. Laxmi, originaire de New Delhi,  pratique passionnément la danse afin de narrer et décrire sa difficulté d’exister en exerçant un art qui la fait rencontrer des garçons. Enfin, nous rencontrons Soumayraa, libanaise, photographie des femmes de tous âges, des femmes qu’elle veut aider en créant une association fondée sur l’éducation et la citoyenneté, synonymes d’indépendance.

I am the future nous dévoile, au fil des chapitres entrecoupés de moments d’échanges entre le trio féminin qui se voit réellement pour la première fois à New York et des dialogues avec l’infortuné Mamadou en distanciel, des portraits qui dépassent souvent l’individuel pour se rapprocher du collectif, comme s’attache à le filmer Rachel Cisinski et son équipe, en variant sa mise en images du plan d’ensemble, voire de grand ensemble (qui permet au spectateur de montrer l’environnement urbain, géographique, géologique, et industriel), aux plans rapprochés (les activités et interventions personnelles et familiales), voire aux gros plans nous donnant le bonheur d’apprécier les mains, les visages, les rires et sourires. Outre ces qualités photographiques, le film déploie une touche poétique par un moment suspendu au sommet d’une tour de New York ou sur la plage de Coney Island, ou devant la perspective offerte par l’architecture de la Défense, par les dessins qui s’incrustent et surgissent sur l’écran tels ce chat ou ces plantes,  voire ces photos prises sur le vif d’une rencontre entre deux conflits. Des instantanés d’émotions, des pauses oniriques et d’espoir.

Evitant le formalisme et le répétitif, variant les arts, I am the future prouve que, lorsque la parole est enfin donnée à ceux qui subissent les crises, la beauté des projets individuels renforce l’espoir de changements multiples sur notre globe terraqué.

 

 

 

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Durée : 98 mn


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