Family Therapy

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#EatTheRich ?

Depuis quelque temps, on observe une recrudescence de productions s’attaquant frontalement aux ultra-riches en exposant avec satire leurs privilèges ainsi que leur déconnexion au monde. C’est par exemple le cas des films très remarqués de Ruben Östlund ou encore de la série The White Lotus (2021-). Un corpus de films pourrait d’ailleurs être rassemblé autour de cette thématique contemporaine que l’on retrouve largement relayée à l’échelle mondiale par le slogan Eat The Rich. Qu’il apparaisse sous forme de hashtags sur les réseaux sociaux ou inscrit sur des pancartes lors de manifestations, cette devise d’ordre provocatrice permet de mettre en lumière les oppressions systémiques et les inégalités sociales.

Family Therapy (2025) entend ainsi s’inscrire dans le sillon de cette entreprise en dépeignant le portrait d’une famille slovène de nouveaux riches dont le quotidien est bouleversé par l’arrivée de Julien, fils né d’une relation extra-conjugale. La démarche n’a, bien évidemment, rien d’inédit : elle avait déjà été amorcée au cours du XXᵉ siècle, notamment à travers les films de Pasolini. En choisissant ainsi comme personnages principaux une famille d’ultra-riche, Sonja Prosenc implique un contexte contemporain associé à de nombreuses attentes que ce type de critique engage

Cependant, le film reste en surface et ne fait que perpétuer des stéréotypes en montrant par exemple les soirées mondaines où se jouent, sur le haut terrain de l’entre-soi qu’est le marché de l’art, performances et présentations de collections d’art contemporain. Ces scènes, au lieu d’interroger les codes ou les logiques de ce milieu, échouent en les entérinant plutôt qu’en les distançant. Le portrait familial manque ainsi de nuance : les personnages sont réduits à des traits caricaturaux, comme le père obsédé par l’idée de faire participer sa famille à un voyage dans l’espace — fantasme emblématique des nouvelles lubies technologiques des ultra-privilégiés. Pourtant, Family Therapy arbore une esthétique léchée, dont la composition visuelle des séquences est semblable à des tableaux. Plusieurs éléments étranges et surréalistes, visuellement très intéressants, ponctuent le film — tel que l’apparition d’une biche — mais mis bout à bout, ils ne parviennent pas à faire sens avec le propos satirique que le film porte. L’étrangeté qui aurait pu être subversive est ainsi reléguée au statut d’ornement : si elle confère une belle photographie au film, elle demeure détachée du fond, comme un habillage qui ne parvient pas à ficeler son dessein. 

Titre original : Family Therapy

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Durée : 122 mn


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