Sans le faire exprès, pour son premier long métrage, Louis-Julien Petit parle solidarité et c´est d´actualité. Avec humour.
Je suis discount. Un premier film, c’est un peu comme une campagne politique. On fait des promesses, on donne beaucoup sans savoir si le public va adhérer au propos, à l’histoire. Louis-Julien Petit ne l’a sans doute pas anticipé mais son film tombe à pic. Parler solidarité, dans un supermarché, alors que le monde se déchire, c’est déjà une preuve d’intérêt dans un domaine qui nous concerne tous, qui nous inclut tous. Et partir d’un fait divers, une caissière d’un supermarché accusée de vol pour avoir utilisé un ticket de promotion abandonné par un client en 2011, dans la vraie vie, aller la rencontrer, la trouver finalement « formidablement vivante », dixit le jeune réalisateur, c’est une démarche que l’on ne peut voir que d’un bon œil. C’est donc la base de ce scénario, un supermarché qui baisse au maximum ses prix, dans le Nord-Pas-de-Calais, une bande de copains qui se sont connus via leur métier dans le discount, un gâchis alimentaire qui en agace plus d’un, un geste et une organisation de marché parallèle de l’aliment pour éviter de gaspiller les produits.
La grande force de Louis-Julien Petit est dans son casting. Olivier Barthelemy en leader charismatique (Gilles), Corinne Masiero (Christiane) toujours aussi vraie et drôle depuis Louise Wimmer(2012), Ombline (2012) ou De rouille et d’os (2012), Pascal Demolon (Alfred) dont on salue le charme et la finesse, Sarah Suco (Emma) la sensible, M’Barek Belkouk (Momo) l’équilibre du groupe ou encore Zabou Breitman (Sofia Benhaoui) en patronne intraitable, ils sont tous unis et complémentaires dans leur situation commune, presque désespérée. Aucun d’entre eux n’a une place plus importante ou écrasante dans ce groupe de jeunes gens solidaires, de différentes générations mais d’avenir identique. Ils se rebellent, avec le sourire et surtout avec intelligence, risque, envie, idées.
Comédie sociale, réaliste, envisageable à l’heure du gâchis sévi par nos supermarchés, Discount est un film engagé mais avant toute chose un film drôle. On rigole d’un sujet difficile, polémique voire tabou. Faut-il encore laisser couler de la javelle sur des fruits et légumes consommables ? Faut-il encore virer ses employés pour les remplacer par des caisses automatiques ? À tort ou à raison, c’est ce qu’il se passe dans nos enseignes, et peu de personnes ont le luxe de s’en passer. C’est donc une fiction comme reflet pur et dur de notre réalité, de notre quotidien de consommateur. Aller voir Discount, c’est un peu jouer le rôle d’un spectateur consommateur engagé, impossible d’aller faire ses courses simplement sans penser au film, une fois vu.
Malgré quelques maladresses dans l’envie presque trop forte de dénoncer, malgré quelques longueurs parfois, Discount est un long métrage intelligent, comique, bien tourné et surtout bien pensé. Et c’est ce que l’on attend du cinéma aujourd’hui, ce que les Anglais arrivent à faire avec facilité, traiter d’un sujet grave avec légèreté, humour, caricature. Le film ne parle pas que de gaspillage alimentaire mais il traite surtout l’entente entre les employés de ce discount, leur engagement et leur volonté d’être solidaires. On aime et on partage.