Après les sept saisons d‘Alfred Hitchcock présente, que nous avons abordées il y a peu de temps ici, le Maître du Suspens participa à une autre série du même type Suspicion dans laquelle il ne réalisa qu’un épisode, et qui se limita à une seule année d’existence. En 1962, Hitchcock décida de reprendre sa place de présentateur facétieux pour une forme de prolongement à son anthologie initiale, cette fois baptisée : The Alfred Hitchcock Hour. La très grande majorité des 93 épisodes étant inédits en France, l’initiative d’ Éléphant Films n’en est que plus appréciable.
On retrouve les mêmes ingrédients de base : sous un air complice, le maître de cérémonie lance aussi bien le récit que des piques contre les annonceurs et plus largement la télévision. Se moque de lui-même, et feint de préserver la Morale. Le Show Alfred Hitchcock suffirait déjà à notre plaisir. Si le crime ne paie pas et que la violence mérite également réparation, ils cimentent toujours les récits tortueux, tendus et haletants. La différence majeure avec la précédente anthologie relève de la durée des épisodes. Le passage à 50 minutes (au lieu des 22 minutes), n’impacte pas la durée diégétique des récits -l’art de l’ellipse et de la condensation étant parfaitement maitrisé dans le format très court-, mais confère une épaisseur bien plus conséquente à chaque histoire.
Dans un grand nombre d’épisodes, le mystère et encore plus le suspens restent à l’affut ou tardent à démarrer, pour laisser la place aux enjeux psychologiques et moraux de la dramaturgie. C’est le cas notamment dans Final Vow (Saison 1, DV2), dans lequel une jeune femme s’interroge avant de prononcer ses vœux pour rejoindre l’église. Ou dans une autre situation, toute la douleur liée la révélation de secrets inavouables dans Triumph (Saison 3, DVD3). Si on le retrouve dans plusieurs films, la toujours efficace antienne d’un être cher à faire disparaître et de la recherche du crime parfait, le machiavélisme est creusé avec beaucoup plus de nuances et de force. A l’instar de la bienveillance du chauffeur de taxi de Bonfire, soulignée par le sourire si déstabilisant de Peter Falk. La jalousie n’est plus un prétexte mais un sujet aux variations infinies. Rivalité masculine dans Tangle Web (Saison 1, DVD1).

La complexité des personnages offre un beau terrain de jeu à des acteurs en devenir, pour lequel le petite lucarne sera un tremplin, ainsi qu’à ceux que le grand écran à déjà consacrés. Parmi les postulants à la popularité, Robert Redford s’illustre à deux reprises (Tangle Web et Piece of Action . Séduisant comme il sera tout au long de sa carrière, mais cultivant une duplicité qui le montre sous un visage – qu’on aurait tendance à avoir oubliée aujourd’hui-, qui sera le sien notamment dans Inside Daisy Clover (Robert Mulligan, 1965) et Willie Boy (Abraham Polonsky, 1969). Parmi les stars qui ont volontiers accepté l’invitation : James Mason, Christopher… et Joan Fontaine. Le rôle interprété par Joan Fontaine dans The Paragon (Saison 1, DVD1) nous renvoie évidemment à Rebecca (1940) et Soupçons (1941), tout en lui permettant également d’exceller dans un registre plus expansif.
Parmi les metteurs en scène, Hitchcock ne réalisera qu’ un seul épisode, et l’on trouve entre autres Jack Smight, Joseph Pevney, Sydney Pollack … et William Friedkin. Si l’empreinte de chaque réalisateur ne fait pas partie du cahier des charges, une maitrise sans faille est au rendez-vous. la plupart de ses moyens-métrages n’ont rien à envier à des très solides productions hollywoodiennes.
Bonus : Le dernier DVD contient une présentation de la série, ainsi qu’une introduction de chacun des épisodes par Jean-François Rauger. Un livret avec une page consacrée à chaque titre et un riche développement sur les thématiques associées au sujet : Hitchcock et la télé, télévision et suspense…
Alfred Hitchcock présente – Les inédits – Intégrale – Coffret 30 DVD chez Éléphant Films.




