True Legend

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Le célèbre chorégraphe nous offre un digest du cinéma kung fu de Hong Kong, avec ses qualités et ses défauts.

Lieu d’ébullition créative à l’influence énorme pour le cinéma mondial dans les années 80/90, la péninsule de Hong Kong s’est vue quelque peu éclipsée par la Corée du Sud durant les années 2000. Sans retrouver les hauteurs de son âge d’or, la production locale n’a pourtant pas démérité notamment grâce aux polars d’un Johnny To ou d’un Derek Yee, même si on peut déplorer que les boursouflées et moribondes coproductions avec la Chine signées Zhang Yimou (les mauvais Hero, Secret des Poignards volants et La Cité interdite) aient eu la primeur d’une sortie en salle. Ces dernières années, ce cinéma retrouve un vrai souffle qualitatif et il semble bien que cela soit dû au regain de forme de ses grands anciens. John Woo nous a offert une époustouflante œuvre guerrière et épique avec Les Trois Royaumes et Tsui Hark a démontré une inventivité et une fougue intactes récemment dans l’excellent Detective Dee.

Dans une moindre mesure, on peut donc largement intégrer Yuen Woo Ping dans le lot avec ce True Legend. Yuen Woo Ping est surtout connu en occident pour ses contributions en tant que chorégraphe et fut fort sollicité au début des années 2000. Les frères Watchowski firent appel à lui pour le premier Matrix (et ses suites) et le succès et l’influence du film (ainsi que de Tigre et Dragons) sur le cinéma hollywoodien d’alors en firent une figure incontournable du cinéma d’action puisqu’on lui doit également les affrontements des Kill Bill de Tarantino ou Danny the Dog.

Loin de n’être qu’un chorégraphe l’homme est aussi réalisateur et c’est d’ailleurs dans ses travaux hongkongais qu’il faut chercher ses plus grandes réussites. On lui doit les combats virtuoses des Il était une fois en Chine de Tsui Hark et lorsqu’il est derrière la caméra, le spectacle relève de la folie pure. En humour débile assumé (il aida à lancer Jackie Chan avec Le Chinois se déchaîne), manichéisme primaire et chorégraphies délirantes éloignées de toute réalité, la plutôt mince carrière de réalisateur de Yuen Woo Ping propose son lot d’ovnis comme Tai chi Master ou Miracle Fighter. C’est un peu de tous ces éléments qui imprègnent ce True Legend, à la limite du pastiche et qui nous replonge au début des années 80. On retrouve deux héros s’affrontant sur fond de rivalités martiales, fraternelles mais aussi amoureuses (le méchant Yuan semblant avoir une attirance quelque peu incestueuse pour sa sœur) dans un récit alignant les archétypes du genre. Trahisons, vengeance et revanche sur fond d’entraînement douloureux rythment donc le film sur un scénario prévisible mais à la naïveté et premier degré agréables.

Yuen Woo Ping évite la routine grâce à son inventivité coutumière lors des séquences de combats. Le méchant dope ainsi ses aptitudes par un usage surprenant de magie noire et notre héros brisé s’entraîne avec un maître qu’on soupçonne d’être issu de son imagination pour un usage inattendu de la schizophrénie dans un film martial. Malgré l’usage un peu abusif du numérique, le savoir-faire de Yuen Woo Ping n’est plus à démontrer et l’ensemble est assez jubilatoire notamment lors de l’utilisation de la légendaire boxe de l’homme ivre. Seul souci, une dernière demi-heure qui s’ajoute lourdement à l’ensemble alors que la trame principale était pourtant achevée. Là le héros et son jeune fils défient en Russie des combattants européens cruels et méprisants (menés par un David Carradine venu cachetonner peu avant sa mort) de la boxe chinoise. Un élan xénophobe bien appuyé et assez étrange, clin d’oeil aux productions nationalistes où les ennemis européens sont souvent montrés comme brutaux et stupides. L’outrance et le second degré sous-jacent désamorcent ainsi le fond douteux car il est plus question ici d’un hommage à une certaine époque du cinéma de Hong Kong (ce que les nombreux caméos tendent à prouver, on croise ainsi brièvement Jay Chou, Gordon Liu ou Michelle Yeoh. Le héros est lui joué par Chiu Man Cheuk, légendaire héros de The Blade). Malgré cette dernière partie dont on serait passé, True Legend offre un agréable spectacle, qui réveillera quelques souvenirs donc.

Titre original : Su Qi-Er

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Durée : 114 mn


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