La vie d´Alex et de Béatrice semble se dérouler sans faille jusqu´au jour où ils se trouvent confrontés, malgré eux, à un univers que la raison a complètement déserté. L´absurdité, le non-sens et l´irrationalité ont réduit en charpie la cohérence et règnent comme des tyrans dans ce monde où l´on est arrêté, placé en garde à vue puis enfermé dans un hôpital psychiatrique pour un motif de pacotille, à l´instar d´un personnage kafkaïen. L´engrenage administratif, machine ultra-colossale, aspire Alex et sa femme avec précipitation. Le couple finit par échoir dans un dédale où partir à la quête du fil d´Ariane pour retrouver le chemin de la raison équivaut à se consacrer à la tache absurde de Sisyphe. L´ordre n´est pas nécessairement inexistant (tout comme dans Caligula où il flirte avec le désordre, sur la voie d´une philosophie transformée en cadavres) mais ici, l´uniforme des policiers, des infirmiers et des psychiatres ne sert qu´à revêtir des automates au verbe évidemment froid, rigide et mécanique. Pas de dialogues possibles face à ces interlocuteurs fantoches. La recherche du sens est donc vouée à la stérilité.
Très bien, merci dresse une critique de la société, société dans laquelle les esprits raisonnables sont claquemurés et gavés de tranquillisants alors que les êtres en proie à la folie et à l´aberration sont libres comme l´air. Pire, ces derniers sont censés gérer et soigner les premiers. Tout est chamboulé, la réflexion a abdiqué face au non-sens comme en témoignent ces entretiens d´embauche triviaux mais abrutis, où l´on attend du candidat qu´il fasse abstraction de son individualité en se métamorphosant en marionnette capable de cracher des poncifs et des réponses toutes prêtes, apprises dans divers guides. Reste à noyer son dégoût face à cette société dans un verre de vinasse, puis de se perdre dans la fumée de sa clope mais Alex et sa femme sont loin d´avoir déclaré forfait et tentent de résister comme ils peuvent face à cette machine absurde.
Le duo formé par Gilbert Melki et Sandrine Kiberlain fonctionne très bien mais le scénario s´avère souvent terne et asthénique. L´on constate malheureusement que le grain de folie a été enseveli. Certes, derrière la gravité des situations, une pointe d´humour émaille gentiment quelques scènes mais le film adopte un style à l´image de la tenue épinglée des employés de bureau, c´est-à-dire un style trop convenu et modéré pour le sujet dont il traite. Très bien, merci suit aussi un trajet extrêmement rectiligne là où l´on attendait de jolis virages et embardées susceptibles de faire jaillir une réflexion effervescente sur le monde absurde qui nous entoure. Le propos d´Emmanuelle Cuau n´est pas exempt de pertinence mais il demeure la plupart du temps épidermique, inscrivant finalement le long métrage au titre prosaïque et anodin parmi les films aussitôt vus, aussitôt oubliés.