Malheureusement, en tant que pur film d’horreur, The Visit se révèle assez faible. Agissant sur un terrain très balisé, Shyamalan cède rapidement aux exigences du genre et peine à en renouveler les formes. Les recommandations de départ des grands parents annonçant les « règles du jeu » (ne pas sortir de la chambre après 21h30, ne pas s’aventurer dans la cave …) installent le dispositif schématique du film d’horreur classique. On entre en effet dans la cohabitation traditionnelle jour/nuit ; la nuit étant l’espace de l’épouvante et le jour celui de l’enquête. De la même manière le dispositif localise spatialement les manifestations surnaturelles (dans la grange, dans la cave, derrière la porte …). Cette manière qu’a Shyamalan de délimiter les instants d’angoisse empêche de napper l’intégralité du film d’une tension latente et progressive. Cette faiblesse narrative rend chacun des effets prévisibles et désamorce par-là leur potentiel sensoriel. C’est pourtant précisément lorsque que la peur s’invite hors de sa zone qu’elle est la plus percutante. L’intrusion, par exemple, de la grand-mère dans une séquence de cache-cache en journée met enfin le dispositif en péril. La grand-mère, mutée en véritable monstre de cinéma, présente enfin une menace et terrifie dans une séquence haletante. Cette séquence reste cependant un sursaut dilué dans un film où la mise en scène manque d’inventivité et qui s’abandonne à trop de facilités scénaristiques (notamment dans un twist final peu surprenant qui ne relance que faiblement l’intrigue).
The Visit n’est cependant pas dénué d’intérêt dès qu’il sort de sa dimension horrifique. En effet, grâce à des personnages très bien construits, et, malgré un surjeux agaçant aux premiers abords, les enfants s’avèrent très attachants. La relation entre Becca et Tyler est décrite avec délicatesse et un humour à ne surtout pas négliger. Car, si The Visit ne fait pas peur, il fait en revanche régulièrement sourire voire rire. The Visit n’est en effet jamais meilleur que lorsqu’il laisse place à ses personnages et à leurs interactions (improvisation de hip hop, disputes fraternelles, reportages commentés de Tyler …). Par leur dynamisme, les enfants portent le film et en modifient presque la perception. Le trouble entre l’horreur et l’humour ainsi posé, comment faut-il réagir à la vision de la grand-mère nue griffant un mur ? Ou encore à celle du grand père lançant une couche pleine des résultats de son incontinence dans la tête de Tyler ? Les gestes horrifiques prennent soudain des allures de gags burlesques et interrogent véritablement le film sur ses finalités. Pris donc entre le charme d’un drame familial et une incapacité à faire naitre l’angoisse, The Visit est un film boiteux. S’il ne signe pas son grand retour, M. Night Shyamalan démontre en tout cas avec ce film mineur qu’il faudra continuer à regarder ses prochaines productions d’un œil avisé.