The Future

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Un chat et une lune qui parlent, un t-shirt qui rampe, un temps qui cale comme une voiture et qu´on ne parvient plus à redémarrer… Et oui ! Miranda July est de retour !

Un couple de trentenaires moderne dans un appartement plus bohémien que bourgeois. Allongés symétriquement l’un en face de l’autre dans leur canapé, chacun un mac sur les genoux, Sophie, professeur de danse pas très douée et Jason, hot liner freelance qui ne semble pas débordé de boulot, apparaissent d’emblée moins comme des amants que comme des frères et sœurs. Leur nid d’amour est cosy, presque trop. Chaque objet semble avoir une place figée pour l’éternité. C’est d’ailleurs ce que Jason feint de faire : il fige le temps, comme ça, pour du beurre. Une catalepsie de couple plutôt prémonitoire…

 

Après le joli succès de son premier long métrage Moi, toi et tous les autres (Caméra d’or au Festival de Cannes en 2005), l’artiste multi-casquettes Miranda July revient avec The Future, un deuxième opus plus sombre mais tout aussi original. Cette fois-ci, elle ne traite plus de la difficulté à rencontrer l’amour mais plutôt des arcanes du couple. Jason (Hamish Linklater) et Sophie (Miranda July), la trentaine bien tassée, semblent encore très adolescents, pour preuve le vieux t-shirt que Sophie tripote comme un doudou. Le chat qu’ils décident d’adopter va changer le cours de leur existence et marquer le passage à l’âge adulte. Ils ont un mois pour réaliser ce qu’ils ont toujours rêvé de faire avant le début des vraies responsabilités. Ils quittent donc leur travail respectif et lancent le compte à rebours.

La question du temps est fondamentale dans le film. The Future – d’où son titre – parle de l’incapacité de Sophie et Jason à se projeter dans le temps et l’adoption féline (qui tournera au vinaigre) en est la métaphore malheureuse. Le futur est effrayant et la vacuité du présent de ces personnages enfonce un peu plus le clou. Improductive alors qu’elle voulait inventer des chorégraphies façon « shake your booty », Sophie ne parvient à exploiter le temps qui lui est imparti. Quant à Jason, il part pour vendre des arbres et revient avec un sèche-cheveux usagé… L’angoisse du futur s’exprime d’ailleurs de façon presque monstrueuse dans une scène remarquable d’efficacité. Miranda July fait défiler les années en un clin d’œil par un simple jeu de contrechamps : en deux minutes, les amies de Sophie passent de la grossesse aux enfants déjà adultes, et bien au-delà !

 

L’adultère de Sophie peut être également lu à la lumière de cette angoisse. Marshall, son amant, affiche vingt ans de plus qu’elle au compteur, il a sa vie derrière lui, une fille déjà grande, un petit pavillon en banlieue, un boulot pépère… Bref, être avec lui, c’est échapper aux choix et prendre le pli d’une vie déjà construite. Lorsqu’il sera sur le point de l’apprendre, Jason, dans un réflexe infantile – ne pas voir la vérité en face -, figera le temps et il le figera tellement bien qu’il aura du mal à le redémarrer ! Avec toutes ses incertitudes existentialistes, ses peurs de l’avenir et ses frustrations du quotidien, The Future est un film à la fois très personnel, drôle, et tout à fait de son temps. Plus noir que Moi, toi et tous les autres et se concluant de manière un peu trop confuse, le film parvient à transcender la thématique éculée du couple en crise pour atteindre à quelque chose de plus cosmique et poétique. La mise en scène toujours aussi soignée de July, ici teintée de fantastique, et son univers décalé qui ne manquera pas d’en agacer plus d’un (la prosopopée de la lune, celle du chat Paw Paw qui entrecoupe le film de réflexions mystico-philosophiques ou le t-shirt qui se met à ramper jusqu’à sa propriétaire et la chorégraphie qui en découle) font de ce curieux objet un film prenant, émouvant et intelligent, pour peu qu’on veuille bien se laisser aller à cette douce folie…

 

 

Titre original : The Future

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Durée : 91 mn


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