Norma et son époux mènent une vie paisible dans une petite ville des États-Unis, jusqu’au jour où une mystérieuse boîte est déposée devant leur domicile…
On avait cru perdre définitivement Richard Kelly. Le jeune réalisateur fut consacré « petit génie » en 2001, grâce à Donnie Darko, fascinant et étrange croisement de David Lynch et John Hughes, qui révéla également le talent de Jake Gyllenhal en adolescent perturbé. Depuis, on avait un peu perdu sa trace, englué qu’il était dans son film « monstre » Southland Tales. Froidement accueilli à Cannes en 2006, Southland Tales était demeuré invisible depuis, soumis à de multiples remontages par un Richard Kelly au perfectionnisme maladif. Enfin sorti cette année (directement en dvd chez nous et aux USA), le résultat fit bien des déçus. Imparfait certainement mais, pour peu qu’on fasse l’effort de s’y immerger, Southland Tales s’avère un déconcertant et envoûtant gloubiboulga apocalyptique et mystique imprégné des peurs de l’ère Bush.
Après ce naufrage, The Box, thriller fantastique plus conventionnel en apparence, était donc une manière pour Kelly de montrer « patte blanche » aux financiers avec un projet calibré, première collaboration avec un studio. Le film est adapté d’une courte nouvelle de Richard Matheson, donnant au récit la rigueur qui manquait au nébuleux Southland Tales. Le texte de Matheson était très court et s’articulait en forme de piège implacable dans sa conclusion. C’est d’ailleurs cette voie qui fut suivie dans une première adaptation dans les 80’s pour la série La Quatrième Dimension. Kelly ne délaisse pas totalement cet aspect avec une ambiance oscillant effectivement entre La Quatrième Dimension et le cinéma américain parano des 70’s. La touche fantastique fait d’ailleurs beaucoup écho à Invasion of the bodysnatchers version Philip Kaufman, notamment la dernière partie, où le danger peut survenir de n’importe quel quidam contrôlé par Frank Langella. La tonalité froide, la photo diaphane et la dominante de blanc renforcent également cet aspect.
La mécanique huilée de Richard Matheson aurait déjà pu offrir un thriller rondement mené et roublard, Kelly lui donne une aura unique en y apportant étrangeté et vraie émotion. Le couple formé par James Marsden et Cameron Diaz (qui trouve là son meilleur rôle depuis bien longtemps) existe vraiment à l’écran, le piège dans lequel se retrouve plongé la famille en devenant d’autant plus palpitant. Le long questionnement avant d’appuyer sur le bouton, les aléas du quotidien qui mènent à céder à la tentation et surtout le terrible choix final, tout cela est transmis avec une réelle empathie. On reconnaît bien là la patte du réalisateur de Donnie Darko. Même le méchant omniscient et manipulateur incarné par Frank Langella s’avère presque touchant de mélancolie dans la mission qu’il s’est fixée, étonnant.
Les séquences bizarres et en apesanteur typiques du réalisateur achèvent de faire de The Box un des films fantastiques de l’année. Ainsi, la scène où James Marsden, traquant les indices, se retrouve transporté « de l’autre côté » est assez inoubliable. Pour finir, ajoutons un score magnifique, entre Bernard Hermann et Angelo Badalamenti, composé par des figures de la pop parmi les plus inventives de ces dernières années. Win Butler et Régine Chassagne (du groupe canadien Arcade Fire) épaulés par Owen Pallett (orchestrateur des cordes sur le disque de The Last Shadow Puppets) se sont ainsi fendus avec brio à leur première musique de film.