Tamara Drewe

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Une adaptation du savoureux roman graphique de Posy Simmonds hilarante à souhait et très stylée. Entre vaudeville et non sens, le cinéaste britannique se joue, finement, de notre obsession des apparences…

Le bonheur est dans le pré. Anglais. Tamara Drewe, est une comédie champêtre hilarante à souhait, concoctée par le très urbain Stephen Frears. Nul risque de rhume des foins donc : si la campagne de son film, saturée de couleurs, semble tout droit sortie d’une autre époque – celle d’un Thomas Hardy par exemple –, formidablement dépaysante à force d’être stylisée, c’est pour mieux y receler un humour… vache, bien sûr ! Et contemporain. Car cette adaptation du très réussi – lui aussi – roman graphique de Posy Simmonds (éditions Denoël graphic), a l’intelligence d’aborder avec bonne humeur mais grande causticité l’un des travers les plus pernicieux de notre époque. A savoir, l’obsession des apparences (et leur fausseté).

Une pincée de non sens, une lichette d’humeur pop, une rasade de vaudeville et l’on rit comme des fous, donc, tandis que s’agite, en la délicieuse résidence pour écrivains de Stonefield (Dorset), une irrésistible communauté de bobos et de ruraux frustrés (auxquel s’ajoute l’indispensable universitaire américain balourd). Parcourue, comme il se doit, d’obscures passions sous des dehors idylliques…

De fait, celle qui met le feu aux poudres est à la hauteur de ce jeu de dupes et de faux semblants : Tamara Drewe, jambes interminables et nez refait, est un pur canon, sauf que sommeille encore en elle la colère de l’ex-ado complexée qu’elle a été. Lumineuse, sexy et un tantinet paumée, cette jeune journaliste people, qui s’en revient dans le village de sa défunte môman, va provoquer une sorte d’onde de choc autour d’elle. Jusqu’à la tragédie. Mais ceci avec une énergie tellement onctueuse, tellement savoureuse d’égoïsme nonchalant et d’excentricité pétillante que tout, mais alors vraiment tout lui est pardonné.

Pestes en chœur

La chance du film, c’est bien sûr son rythme (sur 4 saisons), nourri par le découpage idéal – déjà en forme de story board – du roman originel. Mais ce sont aussi ses comédiens. Outre son talent indéniable pour passer d’un genre à l’autre avec la même aisance, Stephen Frears a l’art de dénicher à chaque fois un casting aux petits oignons. Gemma Arterton (Prince of Persia, Quantum of solace) campe ici une Tamara Drewe finement ironique, jamais antipathique en tout cas. Une sorte d’exploit. Elle est entourée de partenaires savoureux, qui s’en donnent à cœur joie, mais toujours mine de rien, distillant leur narcissisme et/ou leurs mesquineries avec une jubilation contagieuse (notamment Roger Allam et Dominic Cooper, deux des trois amoureux de cette fatale Tamara).

La palme revient néanmoins aux deux pestes de collégiennes incarnées par Jody Long et Casey Shaw qui, tel un chœur de tragédie grecque – l’inconséquence narquoise en plus – commentent (et impulsent, d’ailleurs) l’action du film tout le long. Qu’elles trainent à l’arrêt de bus, fument des joints dans leur uniforme de petites anglaises à socquettes ou dévorent les magazines people, elles demeurent irrésistibles de cruauté adolescente, époustouflantes de drôlerie et… de vérité. Au fond, elles n’ont juste pas idée à quel point le bonheur est dans leur (maudit) pré !

Titre original : Tamara Drewe

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Durée : 109 mn


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