Mon meilleur ami

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Patagonie, émois, émois, émois.

Ouragan argentin

Joli petit film, Mon meilleur ami ne va toutefois pas laisser une trace indélébile dans votre mémoire cinéphilique. Déjà parce que le sujet a été architraité (l’amitié entre un garçon viril et un autre un peu plus tendre, voire homosensible), et puis parce qu’il n’offre pas grand-chose d’autre que sa joliesse et sa mise scène, un peu fade toutefois. Lorenzo est un adolescent agréable et studieux qui vit dans une petite ville de Patagonie, entouré de parents aimants et d’un petit frère, sans problèmes particuliers ni orages à l’horizon. Il a même trouvé une petite amie, des fois qu’on imaginerait qu’il pourrait être homosexuel. Puis débarque un jour Caito, d’un an son aîné, et qui est le fils à problèmes d’un ami de son père, et qu’il a donc déjà rencontré lorsqu’il était plus jeune. Bien sûr, avec sa gueule d’ange déchu et ses airs de tombeur de filles tatoué, Caito va semer le trouble dans la vie et l’âme de Lorenzo. Et voilà, c’est parti pour une heure et demie de jeux de séduction entre les deux garçons, comme dans un échange de vases communicants.

 

 

Le désordre amoureux

Martin Deus, dont c’est le premier long métrage de fiction après cinq courts métrages et un documentaire en 2002, a étudié le cinéma à Cuba et ce film a obtenu le Prix Cannes Écrans Juniors. Il déclare lui-même dans le dossier de presse de son film  : «  Longtemps, l’adolescence m’a obsédé. Je lui ai dédié quelques courts-métrages, un film et une infinité de choses écrites que j’ai gardées dans mon ordinateur. Maintenant j’ai trente-huit ans et je crois que j’ai dépassé ces questionnements liés à l’adolescence. Mais je reste fasciné par cet âge où tout est nouveau, tout est à découvrir, où beaucoup de choses ne sont pas encore définies, notamment en ce qui concerne les émotions.  » De ce point de vue, on peut dire que le film est alors une réussite car il parvient d’une manière presque impressionniste à jouer sur le trouble qui peut naître entre deux garçons, et le jeu qui s’opère entre désir et douleur. Le plus macho des deux peut souvent être en quelque sorte le plus faible, comme c’est le cas pour Caito qui séduit justement Lorenzo lorsqu’il montre ses faiblesses et non pas ses biceps. La lumière du film de Sebastiàn Gallo joue d’ailleurs un rôle très important puisqu’elle parvient à donner des couleurs presque chaudes à cette région de Patagonie réputée pour sa froideur et son aspect désertique. « Je souhaitais que l’environnement soit une métaphore subtile, déclare le réalisateur, quelque chose de beau, naturel et pur, mais aussi douloureusement solitaire. » Et de ce point de vue aussi, c’est une réussite.

 

La solitude de l’amoureux

L’ensemble se donne comme un tableau à la fois de la confusion des sentiments et de l’âge des (im)possibles, car ce que le film donne à voir aussi, et de façon très discrète et pudique, c’est l’extrême solitude du sentiment amoureux, qu’il soit déviant ou hétérosexuel. Le jeune Lorenzo, lorsqu’il découvre l’attirance et l’amour qu’il éprouve pour Caito, est confronté tout de suite au premier ouragan qui le détruit lentement parce qu’il ne peut se confier ni à celui pour lequel il brûle d’amour, ou de désir, ou d’amitié amoureuse (on ne saura jamais), ni à sa mère qui pourtant a tout compris, mais ne dit rien, ou le dit très maladroitement. Nous sommes là en plein dans la solitude de l’adolescence qui doit seule faire l’expérience de la vie et des sentiments.

Nous n’insisterons pas sur le rôle que pourrait jouer ce film pour faire évoluer les mentalités dans une Argentine réputée machiste, mais il est cependant difficile de se convaincre qu’un film, qui est avant tout une œuvre d’art, puisse changer quoi que ce soit dans la société et les mentalités. Ce n’est pas son rôle même si le réalisateur avoue avoir été ému que le film soit soutenu dans son pays et de tous côtés par des personnes hétérosexuelles.

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Durée : 90 mn


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