Il est facile d’être dérouté par L’Hermine, qui fonctionne par petites touches subtiles que selon une ligne narrative claire – partant, il est peu évident de savoir ce dont il s’agit exactement. Une histoire d’amour qui (re)commence à se faire ? Un procès ubuesque où les voix des accusés sont éteintes par celles du corps juridique ? Un peu des deux, et l’on suit en tout cas toutes les pistes lancées par Christian Vincent avec un intérêt certain, tant son regard plein d’acuité frappe juste sur tous les terrains : une conversation dans un café entre Michel et Ditte bouleverse doucement, une explication de la justice à ses jurés d’un jour convainc tout à fait. Il y a surtout Luchi et Knudsen (la politique de la série Borgen) qui excellent chacun dans des registres différents : lui dans l’érudition lettrée et autosatisfaite (mais jamais désagréable), elle dans une douceur que rien n’entrave. Tout en sourires rentrés et en SMS envoyés du bout des doigts, L’Hermine émeut par de toutes petites choses, comme quand Luchini explique que l’écharpe rouge qu’il porte tous les jours est “une manière d’éviter tout effort vestimentaire : c’est elle qu’on regarde, et pas moi”. Le délicat film de Christian Vincent ne parle au fond que de ça : de ceux qui rêvent d’être aimés, mais ne sauraient souffrir d’être au centre de l’attention.
L’Hermine
Article écrit par Jean-Baptiste Viaud
Esquisse de romance sur fond de procès en assise dans le subtil nouveau film de Christian Vincent, avec un Fabrice Luchini en grande forme.