Les enjeux de la restauration
La copie originale sur support nitrate des Vacances de Monsieur Hulot a inévitablement subi les outrages du temps. Il s’agissait donc pour Jérôme Deschamps et Macha Makaïeff, mais surtout pour le patrimoine cinématographique français, de sauver ce chef-d’oeuvre de la destruction. Tati le tatillon est revenu à plusieurs reprises sur son film afin d’ajouter ou de supprimer des gags. La première version date de 1953 puis, au début des années 60, Tati remonte le film, supprime et rallonge des plans. Il réarrange la musique d’Alain Romans et refait entièrement le mixage sonore. Enfin, inspiré par le film de Steven Spielberg Les Dents de la mer, Tati retourne en 1978 à Saint-Marc-sur-Mer la scène de panique provoquée par l’assimilation de la barque de Hulot fendue en deux, à un requin affichant des crocs menaçants.
La restauration des images s’est faite aux Etats-Unis : le Technicolor North Hollywood a effectué les procédés photochimiques traditionnels, éliminant les défauts superficiels des images et protégeant durablement le négatif original, tandis que le laboratoire Technicolor Burbank de Los Angeles a pris en charge la restauration numérique, permettant de travailler image par image. Ces différentes manœuvres ont essentiellement servi à fluidifier les transitions entre les plans du film. Par ailleurs, la restauration a permis de redonner de l’éclat aux nuances de blanc et de noir, à accentuer les contrastes d’un film qui affichait jusque là une teinte à dominante grise.
Le son chez Tati est un mode d’expression très personnel, une marque de fabrique, à la fois subtile et originale. La restauration du son représentait donc un enjeu aussi considérable que celle de l’image. Celle-ci s’est faite à Epinay-sur-Seine, à partir du négatif son de la troisième version. Le résultat sonore de cette nouvelle mouture est à la hauteur de toutes les attentes. Les « teuf teuf »et les « pan ! » du pot d’échappement de la voiture de Hulot sont plus appuyés et donc plus comiques. Les « boings » de la porte de la salle à manger sont encore plus « boiiings ». Bref, le son est tout simplement magnifique. La restauration aura permis de sublimer les qualités rythmiques et la richesse sonore du film, qui y gagne en intelligibilité.
Photogrammes avant et après restauration
A lire également la critique du film par Francesco Capurro, et la chronique du livre de Jacques Kermabon par Alexandrine Dhainaut.