Ce Coin du cinéphile a donc pour principale motivation de marquer la place de ces trois noms dans le cinéma d’auteur d’aujourd’hui, tout en interrogeant franchement l’histoire qui est désormais la leur : celle du « jeune cinéma français des années 90 », devenu aujourd’hui une forme de repoussoir de par certains clichés établis comme à son corps défendant (le phénomène La Vie rêvée des anges, pointant la promesse provisoire d’un grand réalisme social à la française, apparaissant avec le recul comme le plus manifeste de ces clichés) en même temps qu’une incontournable référence (quoi que l’on en pense, ce jeune cinéma français marqua, après des années 80 outrancièrement formalistes – Besson, Beinex –, une volonté notable de concilier autant que possible enregistrement du réel et souffle romanesque, aspirations naturalistes et velléités de pure mise en scène).
Si ce dossier s’est voulu particulièrement centré, se focalisant sur les trois cinéastes précités et leur peu contestable « survie », il semblait bien sûr évident que cet épanouissement n’allait pas de soi, nombre de leurs contemporains ayant vu leur trajectoire prometteuse quelque peu malmenée par un mauvais choix, une rumeur, un instant d’égarement. Ainsi un article global, « Une tendance certaine ? », outre l’évidente référence du titre au fameux article de Truffaut, se veut la proposition d’une relativisation de ces parcours, s’appuyant notamment sur la reconnaissance publique tardive d’un Xavier Beauvois pour mieux mettre en lumière la trajectoire accidentée de ce dernier, l’absence de prestige actuel d’un Éric Rochant, un Cédric Kahn ou une Laurence Ferreira-Barbosa.
Mais au delà de ce seul cinéma français, ce Coin du cinéphile se veut surtout le point de départ de réguliers retours sur les pistes, engagements et (in-)certitudes critiques de ces vingt dernières années. Le temps a t-il par exemple validé les paris sur les cinémas argentin, sud-coréen, allemand, roumain, apparus parmi les plus riches de propositions dans le paysage toujours flou du cinéma contemporain ? Telle sera l’une de nos – nombreuses – questions de ces prochains mois.