Johnny Mad Dog

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Produit par Matthieu Kassovitz, Johnny Mad Dog traite sur un mode proche du reportage de guerre un brûlant sujet d´actualité : les enfants-soldats africains. Ambigu dans sa démarche, le film tend à accumuler les scènes de conflit et peine à s´affranchir du simple constat.

Poussée au combat par un général sanguinaire, une troupe d’enfants-soldats, avide de pouvoir, sème la terreur et la destruction dans la capitale d’un pays africain. Se mêlant à la population en déroute, une fille d’une douzaine d’années s’efforce coûte que coûte de protéger sa famille et de fuir la ville le plus rapidement possible. Menées en parallèle tout au long du film, ces deux situations inévitablement finissent par se rejoindre pour ne former qu’un unique mouvement.

Jean-Stéphane Sauvaire – dont il s’agit du premier long-métrage de fiction – approuve la simplicité. La trame narrative sur laquelle s’agence Johnny Mad Dog n’a effectivement rien d’obscur ni de compliqué. La violence effrénée des enfants soldats ne cesse de s’opposer à la compassion de la jeune fille qui, au regard du monde apocalyptique dépeint dans le film, apparaît comme la seule touche d’humanité digne de ce nom.

Cherchant bien plus à entraîner le spectateur dans le flux des images qu’à lui raconter une histoire, le cinéaste joue principalement sur l’efficacité visuelle de son film et conçoit ce dernier à la manière d’un documentaire pris sur le vif des évènements. Tourné en steadicam, Johnny Mad Dog se compose de longs plans-séquences visant à plonger le spectateur au cœur des scènes de combat.

Assez proche de Full Metal Jacket de Kubrick tant par l’aspect documentaire que par le traitement graphique de la violence, le film de Sauvaire ne se préoccupe pas de la guerre en tant que tel, mais plutôt de la façon dont celle-ci est conduite par ceux qui la font. Tout comme chez Kubrick, il ne s’agit pas de confronter deux camps, voire deux idéologies antagonistes, mais de pointer l’absurdité du système au nom duquel les soldats prennent part au conflit.

Le long-métrage de Sauvaire, toutefois, n’a rien d’un film de Kubrick. Si Full Metal Jacket parvient à dépasser le genre du film de guerre, c’est avant tout parce qu’il repose sur une structure profondément éloquante et subtile. Basique et assez peu provocant dans sa démarche, Johnny Mad Dog, de son côté, se contente d’accumuler les scènes de combat, sans parvenir à les rattacher à une véritable organisation dramatique.

L’œuvre passerait pour un bon exercice de style si le fond même de son projet ne posait pas problème. Premier film à être tourné au Libéria, le long-métrage s’inspire de la guerre civile ayant ravagé le pays jusqu’en 2003. Certaines scènes sont tirées de faits réels et une partie des acteurs ont réellement combattu dans des troupes d’enfants-soldats.

Poussant le réalisme à son plus haut degré, Johnny Mad Dog refuse paradoxalement de passer pour une reconstitution historique. Résolu à ne jamais situer précisément son récit – que ce soit dans le temps ou dans l’espace, Sauvaire abstrait le cours des évènements du territoire auquel ils renvoient légitimement. De là, le malaise. Tenant le Libéria comme une partie quelconque de l’Afrique, le cinéaste semble aborder à l’échelle de tout le continent les problèmes sociaux, militaires et politiques abordés par son film. Ne serait-ce pas là en fin de compte le signe d’une vision réductrice et quelque peu désobligeante ?

Comme une question en cache toujours une autre, demandons-nous pour finir si les productions Kassovitz ne chercheraient pas, tout simplement, à gagner de l’argent sur le dos de l’Afrique…

Sortie le 26 novembre 2008

Titre original : Johnny Mad Dog

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Durée : 96 mn


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