Sur la base d’un scénario très Twilight Zone par son concept aussi étrange que simple se greffe vite tout un univers science-fictionnel fait de paradoxes et de mystères désormais identifiables au style narratif de Richard Kelly.
Si avec Donnie Darko le réalisateur cherchait à reconstruire une dimension nostalgique des années 80, avec The Box, il préfère se servir de cette transposition temporelle pour créer un monde référentiel et cinéphilique plutôt intéressant. Kelly travaille ainsi la texture de son film en lui appliquant une photo très éthérée et des couleurs plutôt ternes pour reproduire l’imagerie des films de science-fiction des 70’s. La musique du trio Butler, Chassagne, Palett, parvient brillamment à retrouver la tonalité grave et dramatique de ses illustres modèles, même si on pense beaucoup plus aux années 50, âge de d’or de la SF, sphère référentielle qui sert de matrice à l’ensemble du métrage.
Le premier acte de The Box met donc en valeur la direction artistique du film et se révèle particulièrement intriguant dans la mise en place des éléments narratifs à venir. Pourtant, a contrario de l’alchimie toute particulière émanant de Donnie Darko, The Box devient très vite indigeste par sa densité narrative qui multiplie différentes pistes jamais exploitées puisque systématiquement écrasées par un enchaînement ininterrompu de révélations et de multiplication des intrigues. Kelly abandonne trop vite la dimension intimiste de son récit initial qui finit par tanguer au gré de ses propres références, puisque de Twilight Zone, on passe à L’Invasion des Profanateurs de Sépultures avant de se retrouver encore dans d’autres univers référentiels. Ce procédé narratif vient vite à bout du spectateur et de son empathie pour les deux protagonistes.
L’ambiance délétère du film se disloque peu à peu et perd de vue ses personnages pour les mêler à un projet plus vaste jouant beaucoup trop sur les mystères non-résolus à la David Lynch mais qui, vidé de tout onirisme, laisse un peu le spectateur de côté. On se bornera à jouer à un jeu des références cachées plutôt vain et quelque peu prétentieux en lieu et place d’une vraie réflexion sur la notion de sacrifice aveugle qui pouvait pourtant accoucher d’une multitude de pistes thématiques actuelles… Dommage, car The Box n’est pas dénué de qualités, et son ambiance rétro fonctionne souvent. Certaines séquences son même très réussies comme celle, déchirante, de l’enfant qui devient mêlé au choix cornélien censé sauver l’humanité. Cet aspect moraliste qui se glisse dans la seconde partie du métrage fait d’ailleurs intervenir un jugement plutôt mal placé sur ses propres personnages alors qu’un tel sujet devait s’en soustraire pour parvenir à créer l’empathie attendue. Tous les espoirs placés en Richard Kelly après Donnie Darko, déjà altérés par Southland Tales, se délitent un peu plus avec The Box même si le film est tout de même loin d’une catastrophe filmique et que l’on peut encore attendre beaucoup de son auteur.
Bonus
Distribué par l’excellent éditeur Wild Side, le DVD (comme le Blu-ray) contient plusieurs modules dans lesquels Richard Kelly revient sur son film, notamment à travers un commentaire audio clair et complet. A cela s’ajoutent un entretien avec le réalisateur ainsi qu’une courte interview de Richard Matheson. Le module « The Box, ancré dans la réalité » révèle toute la dimension autobiographique du métrage (surtout dans la construction des personnages principaux) et fait intervenir les propres parents de Kelly. Enfin, le dernier bonus revient sur la création de certains effets spéciaux du film comme celui appliqué au mystérieux visage d’Arlington.