Disco

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Après le maintenant culte Camping, Fabien Ontoniente, accompagné de son désormais acteur fétiche (le toujours cool Franck Dubosc) offre une comédie populaire au sens le plus simple du terme. Comme dirait un certain Mika : « Relax, take it easy! ».

Une appréhension précédait la découverte : celle que Fabien Ontoniente, emporté par un sentiment d’acquis suite au surprenant carton de son précédent film, Camping (2006), se présente pour son come back comme l’arrogant symbole d’une forme de victoire du cinema du dimanche soir, d’un vieil héroïsme popu. Ce Disco ne s’attendait pas sans scepticisme, l’ idée – sans doute un peu condescendante – que de toute façon, cette fois encore, la critique n’aurait pas le dernier mot… Il se peut qu’au final la griserie du samedi soir soit réconciliatrice, que, cerné par les éclats de boules à facettes, attiré par la lattitude du dance floor, chacun se laisse aisément prendre au jeu du dancing show.

Le rire, dans ce cinema, n’est pas forcément la résultante d’un sens particulier de la mise en scène, d’un art consommé du punchline ou d’ une foisonnante rythmique de jeune homme. Au contraire, chaque scène, chaque réplique transpire l’écriture, le labeur scénaristique, la volonté d’efficacité et de transparence. Une troublante propension à esquiver l’ambiguïté, à briser toute idée de mystère pourrait définir ce cinoche grand public des années 2000, dont les qualités esthétiques , « cinématographiques », sont trop souvent bien en-deçà de la quantité finale de spectateurs. Plus c’est facile, mieux on rentabilise… Ce début d’année, par le sacre d’Astérix et des Ch’tis, en attendant celui de Disco, confirme la règle.

Mais n’y a-t-il pas parfois du bon à être un peu tenu par la main, à assister sans broncher à ce jeu de connivences, cette volonté de conformité aux attentes populaires ? Surlignant à l’excès le degré extrême de beauferie et de ringardise de son personnage de Didier Graindorge/Travolta (incarné avec une simplicité confondante par un Franck Dubosc décidément unique en son genre, comique attachant à l’impudeur assez fascinante), brossant le portrait d’un Havre sans aspérités, le film touche pourtant. Oui, il est facile de miser ainsi sur le défilé de bonnes têtes ayant lointainement marqué la mémoire collective (Annie Cordy, Danielle Gilbert, Julien Courbet…), et quelque part, on peut se demander s’il n’y a pas un peu de cynisme à jouer aussi systématiquement du cliché… Mais au moment où apparaît, surgissant de nulle-part, Francis Lalanne… pas dans un rôle quelconque mais pour lui-même, « comme à la télé », tout s’éclaire : Ontoniente emploie ces gens là parce-qu’il les aime, tout simplement. Cette France immémoriale, c’est celle de son cœur, celle de sa propre éternité.

Avec moins d’audace que Fellini, mais peut-être autant de cœur et de foi dans son entreprise, l’auteur de Jet-set va au bout de ses fantasmes, expose avec une telle frontalité un monde, des signes surgissant de son seul jardin, que la moindre suspicion d’escroquerie tendrait au hors sujet. Si Graindorge et ses vieux potes veulent encore enflammer la scène sur d’éternels tubes seventies, à quarante balais, pourquoi ne pas les soutenir ? C’est ce que fait d’ailleurs France Navarre, la prof de danse classique improvisée disco master, jouée par une Emmanuelle Béart parfaitement intégrée dans cet univers pourtant si éloigné de ce que semble être sa « famille » (le cinema d’auteur, les hautes solitudes) : elle baisse les armes, d’abord amusée, touchée ensuite, libérée finalement.

Ce qu’il faut reconnaître, c’est que la danse reste au départ un domaine très fédérateur, le territoire le plus direct de la séduction, cinématographique ou autre. « Tous en scène ! », criait jadis un certain Minelli, emporté par les jeux de jambes de Fred Astaire . « Au galop ! » est la sommation d’Ontoniente (ainsi que le titre – partiel – de son premier film). Certes les jambes sont plus lourdes, la tenue moins légère (de la veste à paillettes à la combinaison moulante tendance Travolta chez les Teletubbies)… mais, ici aussi, tout glisse avec bonheur.


Titre original : Disco

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Durée : 103 mn


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