David Cronenberg

Article écrit par

Alors que sort en salles « Les Crimes du futur », en compétition au Festival de Cannes, retour sur l’oeuvre mutante de David Cronenberg.

Avec son dernier film Les Crimes du futur, c’est encore des phénomènes de mutation qu’explore David Cronenberg, des mutations aussi bien organiques, physiques, ici avec un Viggo Mortensen en artiste mutilant de body art, que les mutations mentales qui accompagnent l’évolution d’un monde où la technologie et la marchandise dévorent tout sur leur passage. Il peut s’agir de projections transhumanistes dans Les Crimes du futur, mais aussi, près de quarante ans avant, dans Videodrome (1983), des transformations provoquées par l’omniprésence des images télévisuelles, ou celles des jeux vidéo (ExistenZ,1999) sur l’intégrité cérébrale de l’humain. Le cinéaste ne cesse d’imposer les chairs balafrées, mutées et sexualisées comme pour exorciser les êtres de ses films de l’ordre libéral mondial. La monstruosité capitonnée de Cosmopolis (2012) côtoie ainsi celle des stars névrosées de Maps to the stars (2014). En cela, il n’est pas anodin que David Cronenberg ait adapté des auteurs comme J.G Ballard (Crash,1996) et Don DeLillo (Cosmopolis), tout deux écrivains éclaireurs des déviances contemporaines. De même en adaptant Le Festin nu, (1991) de William S. Burroughs. Qu’il ausculte le basculement d’un homme dans la violence dans History of violence (2005) ou les tréfonds de la psychanalyse (A Dangerous method, 2011) David Cronenberg sonde comme un sismographe l’ébranlement des organismes humains au contact des simulacres contemporains. Qu’il s’agisse de la fascination sexuelle pour un corps blessé par un accident de voiture (Crash), de l’attraction exercée sur des mains gantées pour camoufler une brûlure (Maps to the stars) ou du trouble cognitif provoqué par un câble usb organique branché sur un flanc de femme et d’homme afin de participer à un jeu virtuel, le cinéma de David Cronenberg continue de confronter avec toujours plus de prégnance le mutant humain du présent au mutant augmenté du futur.

Bonne lecture!


Partager:

Twitter Facebook

Lire aussi

Chronique des années de braise: une épopée tumultueuse portée à son point d’incandescence

Chronique des années de braise: une épopée tumultueuse portée à son point d’incandescence

C’est toute une mémoire collective du peuple algérien que retrace l’odyssée mouvementée du paysan Ahmed, héros mythique d’une épopée visionnaire. Evoquées dans un scope 70 mm en Panavision éblouissant de lumière crue, ces années de braise sont le ferment d’une révolution qui embrase sourdement une population sacrifiée par la colonisation française. La fresque homérique oscille entre une conscience nationaliste aigüe et un lyrisme de tragédie grecque où le réalisateur Mohammed Lahkdar-Hamina se mue en oracle histrionique, voix prophétique et guide spirituel d’un peuple en quête d’émancipation. Analyse…