Personnages convenus pour une mise en scène confortable
« Tout nous sépare » titre le film, est en effet c’est ce que l’on pourrait croire à la vue des oppositions individuelles et sociales qui alimentent le récit : Louise et Julia vivent dans une maison bourgeoise isolée, tandis que Rodolph et son camarade Ben (le rappeur Nekfeu pour la première fois à l’écran) habitent des barraques populaires de la cité de Sète. Les uns et les autres vont pourtant se retrouver pieds et poings liés à la suite de la mort de Rodolph. Cet enchevêtement de personnages contraires autour de l’intrigue et de ses péripéties aurait été plus réussi s’il ne proposait pas des figures déjà trop vues à l’écran : Nicolas Duvauchelle dans le rôle d’un mauvais garçon violent, le rôle – forcément féminin – d’une jeune femme diminuée en quête de sensations fortes qui tombe amoureuse de cet homme qui la méprise, le voyou prêt à tout dans le but d’aller se construire une vie ailleurs,…Tout émerge de représentations et d’un imaginaire assez convenus, voire d’une tiédeur générale d’un cinéma français aux drames très confortables. C’est davantage les acteurs, par leur talent, qui tirent leur épingle du jeu, que leurs personnages eux-mêmes. On sent le plaisir du cinéaste à filmer Catherine Deneuve, à lui donner un rôle important, une profondeur que n’ont pas les autres, endossé d’ailleurs avec allure par celle-ci. Néamoins, cela ne suffit pas à incarner suffisamment le film.
Climat
Tourné à Sète, l’oeuvre aurait gagné à développer son ancrage dans la ville, qu’elle capte déjà par petites touches : dès son ouverture, qui s’attarde sur un chantier du port, lors des scènes près d’un étang, et au coeur de la ville même, des bâtiments où vivent Ben et la famille de Rodolph. Cet arrière plan qui reste esquissé donne pourtant une identité au film, bien plus que ses péripéties convenues. En dépit ce ces caractères typés, Tout nous sépare s’inscrit dans la longue liste de ces drames français qui, sans être mauvais, s’abordent sans enjeu cinématographique particulier et qui, malgré certaines belles incarnations actorales et une narration sans trou, s’ouvrent et se ferment laissant le spectacteur dans une forme d’indifférence.