The Square

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Ray (David Roberts) et Carla (Claire Van Der Boom) sont amants. Tous deux mariés, presque voisins, ils semblent partager un sévère ennui pour la vie dans laquelle ils se sont fourrés. Lorsque le mari de Clara, l’inquiétant Smithy, rapporte à la maison le butin de son dernier coup, celle-ci voit enfin le moment de fuir […]

Ray (David Roberts) et Carla (Claire Van Der Boom) sont amants. Tous deux mariés, presque voisins, ils semblent partager un sévère ennui pour la vie dans laquelle ils se sont fourrés. Lorsque le mari de Clara, l’inquiétant Smithy, rapporte à la maison le butin de son dernier coup, celle-ci voit enfin le moment de fuir avec son amant, en emportant avec eux un joli paquet de dollars. Mais puisque nous sommes dans un polar, rien ne sera aussi simple, et chaque action entreprise pour fuir enfermera un peu plus les deux héros dans une situation inextricable.

Du cinéma australien, la France reçoit avec parcimonie quelques pépites, souvent intéressantes et prometteuses, mais bien trop rares, à l’image de Lantana de Ray Lawrence en 2002, histoire policière où le destin et les actes parfois anodins des personnages avaient de surprenantes et tragiques conséquences. The Square exploite aussi pleinement tous les attributs du polar : une situation a priori simple, un couple d’infidèles souhaitant échapper à son environnement, et beaucoup de complications dès lors qu’un pactole entre en jeu. Le mari trompé et volé n’en restera pas là, le plan des amants tournera mal, impliquant un petit malfrat pyromane, et Ray, victime de chantage, n’en finira pas de faire les mauvais choix.

Le mensonge et la dissimulation, cœurs et moteurs obligés de l’histoire du film, donnent lieu à des séquences pleines de tensions et intelligemment mises en scène. Nash Edgerton, dont c’est le premier long-métrage, utilise la caméra pour acculer ses deux personnages principaux, les enfermant progressivement dans le cadre, scrutant leurs réactions comme on observe deux poissons dans un bocal manquant d’eau.

Durant le premier tiers du film, le réalisateur met savamment ses personnages (pions) en places, prêts et ignorant qu’ils sont devenus les jouets de leurs propres destins. Tous traités avec une égale attention, ils ne manquent jamais d’humanité : qu’ils soient petit truand, pyromane ou employé du chantier où travaille Ray, ils ont en commun de se démener dans une existence qu’on sent morose, et où l’argent vient toujours à manquer pour vivre mieux.

Ray en particulier, personnage peu loquace et plutôt porté sur la passivité, bientôt bousculé par Clara le pressant d’agir, devient le réceptacle des malheureuses conséquences que leur vol manqué va provoquer.
Lorsque la situation devient dangereuse pour les amants, le film prend un tour plus rythmé, et quelques scènes d’actions bien nerveuses finissent d’emporter le spectateur  pour ne le relâcher qu’une heure plus tard, crispé à son siège, et remué par un final audacieux. La steadycam fluidifie les scènes, tout en collant toujours au plus près des personnages et de leurs tourments.

Il serait dommage de dévoiler les ressorts de l’intrigue, de même que le sens du titre du film, tant les attributs typiques du polar, la malchance, le hasard, la peur et la violence déployée lorsque l’on est poussé à bout, sont ici utilisés avec ingéniosité et  cruauté. Le réalisateur a néanmoins la délicatesse d’alléger son récit par quelques scènes tendres, presque burlesques, comme celle où le chien de Clara ne cesse de s’enfuir pour venir percuter la baie vitrée de la maison de Ray, qui se trouve à quelques mètres. Rappel du lien qui unit sa maîtresse et Ray, le chien ne manque pas une occasion de s’échapper, jusqu’à connaître lui aussi un drôle de destin. 

Le film acquiert par ailleurs un charme particulier grâce à sa situation géographique, quelque part en Australie, où l’on célèbre Noël en tee-shirt, en se prélassant au soleil dans un parc à l’occasion d’un pique-nique géant, et où le lendemain, la pluie diluvienne devient l’instrument du destin. Un polar efficace ne manquant ni d’atmosphère ni d’audace, donc hautement recommandable.


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