Comment être un bon père de famille quand on a 533 bouches à nourrir ? Réponse dans ce « feel-good movie » amusant mais sans surprise.
« Vous avez là tout le matériel nécessaire », explique une infirmière à un jeunot embarrassé, tout en lui tendant une éprouvette et des revues pornos. Le gringalet étudie les photos cochonnes avec perplexité, essaie vainement de s’exciter, puis renonce. Il se contente alors de feuilleter le magazine comme le ferait une mamie rabougrie dans la salle d’attente d’un dentiste. A la fois euphorisante et culottée, cette première scène laissait présager le meilleur : une comédie audacieuse, voire franchement révolutionnaire, sur le thème de la paternité et du don de sperme.
David Wozniak (le gamin du début), a passé le cap de la quarantaine mais vit toujours comme un ado attardé. Engoncé dans un T-shirt Avengers surmonté d’une veste de survêtement difforme, il donne un coup de main à la boucherie familiale et cultive de l’herbe pour arrondir ses fins de mois. Il va et vient au volant de sa camionnette miteuse, entre une famille qui l’humilie, une petite-copine enceinte et une bande de mafiosos à qui il doit une somme astronomique. De l’avis général, c’est un raté, un type tristement prévisible. Qu’a-t-il fait de sa vie ? Eh ben, il a donné son sperme. Souvent. Très souvent. Vingt ans après les faits, il apprend qu’il serait le géniteur de 533 enfants. Tabernacle !
Le loser de service tente d’abord d’étouffer sa paternité dans l’oeuf, puis décide de faire face à son destin hors-du-commun en jouant les papas-poules. Il retrouve la trace de ses rejetons et les encourage, maladroitement, à accomplir leurs rêves. Après Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain, voici donc un deuxième guide à l’attention des apprentis anges-gardiens. Rassurez-vous, aider son prochain, ce n’est pas si compliqué : encouragez un jeune acteur à passer l’audition de sa vie, empêchez une jolie junkie de se camer nuit et jour, applaudissez un musicien qui s’égosille dans le métro et le tour est joué. Mais les choses se compliquent lorsque David doit avouer à ses petits protégés sa véritable identité ainsi que son passé de donneur de sperme compulsif…
Réalisateur québécois encore inconnu en France, Ken Scott a le culot d’aborder une question d’actualité chaude comme la braise, à savoir les mutations de la cellule familiale à l’aube du XXIe siècle. Il ne le fait pourtant qu’avec des pincettes, laissant de côté les thèmes de la sexualité ou des rapports de couple pour privilégier celui de la vie en collectivité, visiblement revenu au goût du jour (comme en témoigne le succès inattendu de Et si on vivait tous ensemble ?). Les enfants de David, réunis par leur destinée commune de bébés-éprouvettes, se lient d’une amitié indéfectible et organisent des week-ends barbecue-camping dignes des jolies colonies de vacances d’antan. Etre tous frères et sœurs, c’est vraiment trop fun ! Ces jeunes gens – que le réalisateur voudrait représentatifs des différentes strates de la société – ont la fougue et la beauté de Barbie et Ken, formes généreuses et chevelures dorées pour les demoiselles, muscles saillants et sourire bright pour les messieurs. Finalement, Jason Reitman bousculait davantage les conventions en décrivant, dans Juno, les tribulations d’une adolescente enceinte, gouailleuse et bravache, que ne le fait Ken Scott avec son histoire de dons de sperme à répétition.
Malgré son scénario plan-plan, il orchestre une chronique familiale cocasse, débordante d’énergie vitale et de bonne humeur, où les répliques font souvent mouche. Un feel-good movie naïf mais touchant, qui se termine comme un conte : « Ils vécurent heureux et eurent beaucoup (beaucoup) d’enfants… ».
Dans son « cinéma club » du MK2 Beaubourg, Hélène Frappat, ancienne critique des Cahiers, parle des processus de « cadavérisation » des femmes, horrifiants et envoûtants, muséaux et momifiants.
« L’étrange obsession » autopsie sans concessions et de manière incisive, comme au scalpel ,la vanité et le narcissisme à travers l’obsession sexuelle et la quête vaine de jouvence éternelle d’un homme vieillissant, impuissant à satisfaire sa jeune épouse. En adaptant librement l’écrivain licencieux Junichiro Tanizaki, Kon Ichikawa signe une nouvelle « écranisation » littéraire dans un cinémascope aux tons de pastel qui navigue ingénieusement entre comédie noire provocatrice, farce macabre et thriller psychologique hitchcockien. Analyse quasi freudienne d’un cas de dépendance morbide à la sensualité..
« Les derniers jours de Mussolini » adopte la forme d’un docudrame ou docufiction pour, semble-t-il, mieux appréhender un imbroglio et une conjonction de faits complexes à élucider au gré de thèses contradictoires encore âprement discutées par l’exégèse historique et les historiographes. Dans quelles circonstances Benito Mussolini a-t-il été capturé pour être ensuite exécuté sommairement avec sa maîtresse Clara Petacci avant que leurs dépouilles mortelles et celles de dignitaires fascistes ne soient exhibées à la vindicte populaire et mutilées en place publique ? Le film-enquête suit pas à pas la traque inexorable d’un tyran déchu, lâché par ses anciens affidés, refusant la reddition sans conditions et acculé à une fuite en avant pathétique autant que désespérée. Rembobinage…