Noël à Miller’s Point

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Le père Noël n’est pas une ordure, quoique…

Réalisateur et producteur indé

L’Italo-américain Tyler Taormina a déjà connu une bonne cinquantaine de fêtes de Noël en famille qui se passent régulièrement entre petits bonheurs et mesquins conflits. Ayant remarqué que le cinéma contemporain réalisait de moins en moins de films sur Noël, il a voulu créer le sien, et il nous offre ici un petit bijou autobiographique en partie, et mélancolique à souhait. Réalisateur, scénariste et producteur basé à Los Angeles, Tyler Taormina est l’un des principaux membres du collectif Omnes Films. Hormis ce dernier long-métrage, il a déjà réalisé deux films, notamment Ham on Rye et Happer’s Comet, qui ont tous deux été salués par la critique. Après Christmas Eve in Miller’s Point, trois autres films sont attendus et ils sont seulement produits par le réalisateur, dont Eephus de Carson Lund, sélectionnés à la Quinzaine des Cinéastes cette année, mais aussi Los Capitulos perdidos et No Sleep Till.

Guirlandes et mélancolie

Pour son troisième film en tant que réalisateur, il nous propose donc une sorte de portrait de famille réalisé à la manière d’un film choral. Tout se passe le soir de Noël. Tout est garanti avec guirlandes, rouge et or, dinde farcie ou pas, et famille autour de la grande table avec petits plats dans les grands, à la manière américaine mais avec une petite touche made in Italy. Et pourtant, pour ce énième Noël ensemble, une ombre plane : la vente de la maison et une sorte de sourde mélancolie qui vient colorer cette fête de famille qui entrevoit ainsi ses bases se saper et les enfants grandir et devenirs plus indépendants. Une grande famille turbulente se réunit dans une petite ville de Long Island pour ce qui pourrait être le dernier réveillon de Noël dans la maison familiale. Alors que les célébrations battent son plein, marquées par des retrouvailles hautes en couleurs, traditions parfois fantasques et autres querelles générationnelles, deux jeunes cousines profitent de la confusion pour s’enfuir dans la froide nuit d’hiver et faire de cette fête la leur.  Les jeunes vont vite, deux policiers fantasques les traquent et on se retrouve à la fois dans la tristesse mais aussi une forme de burlesque qui ne fait qu’accentuer la douleur de cette fête à la fois consumériste et chrétienne tout comme la détresse engendrée par le temps qui passe et qui avec sa corde fait des noeuds. Des noeuds difficiles à dénouer et qui bloquent une évolution qui se voudrait pacifique et tranquille.

Le temps qui passe

« Avec mon partenaire d’écriture Eric Berger, explique le réalisateur dans le dossier de presse du film, nous trouvions que Noël était l’excuse parfaite pour lancer le projet que nous avions en tête. En discutant des fêtes de fin d’année et en pensant avec nostalgie et humour aux membres de nos familles, très vite, nous avons réalisé la splendeur de cette fête. Les moindres détails spécifiques à la décoration de Noël renforcent cette idée et notamment l’immense besoin qu’ont les Américains de décorer leur maison. Nous voulions nous éloigner des modes de narration traditionnels afin de faire exister cette idée de Noël, de la famille, des amis, des souvenirs. » Grâce à la belle photo de Carson Lund (le réalisateur de Eephus produit par Tyler Taormina) et à une belle brochette d’acteurs, parmi lesquels on pourrait citer Matilda Fleming, Michael Cera, Francesca Scorsese, Gregg Turkington, Elsie Fisher, Sawyer Spielberg et Maria Dizzia, le film ne fait pas mentir le poète pour qui « rien n’est jamais acquis à l’homme » et cette fête ratée et réussie à la fois pourrait bien éclairer d’une manière plus grave et plus mélancolique votre propre Noël. Ca tombe bien, le monde va très mal. 

Titre original : Christmas Eve in Miller’s Point

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Durée : 106 mn


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