Moon (Duncan Jones, 2009)

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Pour son premier long métrage, Duncan Jones nous offre un huis clos à l’atmosphère à la fois sombre et onirique.

Moon, c’est l’histoire d’un astronaute, Sam Bell (interprété par Sam Rockwell), qui travaille depuis trois ans au sein d’une station lunaire avec pour seul compagnon, un robot intelligent. À la suite d’un accident, il découvre que la société qui l’engage, Lunar, n’est pas ce qu’elle prétend être. Dans de nombreux entretiens, Duncan Jones ne le cache pas : il est fan de science-fiction. Cela se traduit incontestablement dans Moon. Reprenant les codes des films SF des années 1970 et 1980, Moon est un drame psychologique avant d’être un produit purement science-fictionnel. Le spectateur est plongé dans le thème environnemental dès le début du film lorsque Lunar, par le biais d’une publicité, expose une société à l’énergie propre – l’hélium 3 –, quasi-utopique. Ce sujet était déjà abordé dans Silent Running (Douglas Trumbull, 1972), dont l’œuvre de Duncan Jones a pu s’inspirer – on y retrouve cette même figure du scientifique solitaire bloqué sur une base de recherche. Jouant sur le sentiment de claustration du personnage et des effets sur sa psychologie, thèmes maintes fois abordés, Moon se distingue pourtant par son originalité scénaristique et son intelligence esthétique.

 

  

Avec un budget de seulement cinq millions de dollars, le principe du huis clos s’est imposé naturellement. Un lieu, un acteur. Mais Sam Bell n’est pas totalement seul. Un robot, GERTY – lointain descendant de Hal dans 2001 : L’Odyssée de l’espace (Stanley Kubrick, 1968) –, doit assurer la réussite de ses missions. Seulement, la psychologie robotique est poussée jusqu’à l’extrême, favorisant la naissance d’une empathie du spectateur envers ce personnage peu commun. Ses sentiments sont exprimés à travers des smileys qui rendent GERTY bien plus humain qu’il n’y paraît. Quant à Sam Bell, son humanité se décuple au fil du récit, en cadence avec le drame qui s’intensifie. Car si la station (piégée sur la Lune, en outre) est initialement un lieu de recherche, c’est aussi un lieu de vie que Sam s’est approprié. Les photographies de sa femme et de sa fille ornant ses meubles, les étiquettes nominatives et manuscrites des machines, la maquette sont autant d’éléments permettant de donner vie à cet endroit bien trop blanc, lisse et clos. Mais, à l’arrivée d’un nouveau personnage, tout chavire. Ce lieu de vie devient une prison dont les personnages cherchent à s’échapper. Les plans sont longs, la musique (signée Clint Mansell) est angoissante, le blanc devient gris, les personnages comme les spectateurs s’enlisent vers un point de non-retour. À l’écran, cela se traduit par la lente descente aux Enfers de Sam (littéralement lorsqu’il découvre, en sous-sol, un recoin jusqu’ici caché de la station), dont la psychologie et la santé physique se dégradent.

 

 

Jusqu’ici onirique et sobre, l’atmosphère sombre et tragique envahit la station et la Lune. Le cadre se resserre au plus près des personnages, nous permettant d’assister intimement aux conversations entre Sam et son acolyte. La moissonneuse, symbole même de l’exploitation et de la technologie moderne, exiguë et obscure, devient le lieu de rédemption dans un final mélancolique mais plein d’espoir. La Lune n’est plus seulement notre satellite mais un microcosme à part entière, dont la face cachée recèle de secrets. L’onirisme repose surtout sur l’esthétique même de l’environnement extérieur. Duncan Jones choisit brillamment d’utiliser des maquettes (méthode couramment utilisée dans les années 1970-1980) et non pas un traitement numérique. Le film n’en est que plus juste, plus proche du réel et par extension, bien plus tragique dans l’idée qu’il développe. L’humanité est véritablement au cœur de Moon, qui interroge notre société d’exploitation moderne et les multinationales aux valeurs douteuses.

Titre original : Moon

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Durée : 97 mn


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