Le cinéma nous relie
Il est des gâteaux qu’on n’oublie pas et celui que prépare Mahin, soixante-dix ans, pour son nouvel et tendre amour, vous ne l’oublierez pas non plus. Ce film iranien magnifique et, bien sûr, condamné par les ayatollahs, fera le bonheur des spectateurs, déjà parce qu’il est plein de tendresse et de vouloir-vivre mais aussi parce qu’il fait preuve encore une fois de la force, de la bonté et de la créativité du cinéma iranien. Le sujet du film est simple mais d’une force limpide et puissante à la fois. À Téhéran, Mahin a 70 ans et vit seule. Un jour, elle décide de rompre avec sa routine et de réveiller sa vie amoureuse. Une rencontre inattendue se transforme alors en une soirée inoubliable. C’est tout et c’est beaucoup. Après Le Pardon en 2021, voici le deuxième long-métrage des deux réalisateurs dont ce Gâteau préféré vient de recevoir de nombreux prix de par le monde, notamment à Berlin, le Prix Oecuménique et le Prix Fipresci, pour lesquels ils ont écrit dans une lettre émouvante ces mots forts, qui donnent espoir en un changement en Iran : « Aujourd’hui, le film auquel nous avons consacré trois ans de notre vie va voir le jour à vos côtés, malheureusement en notre absence. Comme des parents à qui l’on interdit de poser les yeux sur leur nouveau-né, il nous a été interdit de savourer le plaisir de voir notre film avec vous, le public averti de cet important festival. Nous sommes tristes et fatigué.es, mais nous ne sommes pas seul.es. C’est la magie du cinéma. Le cinéma nous relie, nous rassemble. »
De superbes comédiens
Servi par deux acteurs hors pairs, Lily Farhadpour dans le rôle de Mahin, avec ses airs de notre Bouraouia Marzouk chère à Abdellatif Kechiche, et Esmail Mehrabi dans le rôle du tendre et chéri Faramarz, ce film vous bouleversera parce qu’il parle sans détour de l’avenir des femmes dans la société iranienne, d’une manière à la fois grave et humoristique – notamment dans la rencontre des vieilles copines qui laissent un goût amer de victoire et de joie de vivre. Il parle aussi de leur relation aux hommes et de la manière dont la société et le gouvernement veulent les tenir en lisière.
La joie de vivre malgré tout
Sur leur propre scénario et avec l’aide précieuse d’un grand et talentueux directeur de la photographie, Mohammad Haddadi, et avec des décors et des costumes qui ne vont pas sans évoquer le néoréalisme italien, comme souvent en ce qui concerne le cinéma iranien, ce film va droit au coeur et ne s’oubliera pas facilement. « Ce film est basé sur la réalité du quotidien des femmes iraniennes de la classe moyenne et se penche sur la solitude d’une femme à l’aube de la vieillesse, déclarent les deux réalisateurs dans l’entretien qu’ils ont accordé au dossier de presse du film. La réalité de la vie des femmes d’Iran a été peu racontée, et le film est pourtant un conte enjoué sur l’espoir et la joie de vivre, comme sur l’absurdité de la mort. » Voir le visuel : https://www.youtube.com/watch?v=WfeKM-64kmU