Le cinéma israélien est d’une richesse qui ne cesse d’éblouir. Mes plus belles années, succès populaire et critique dans son pays d’origine, confirme la règle. Le célèbre comédien et dramaturge israélien Reshef Levi livre avec son premier long métrage, inspiré de sa propre histoire familiale, un chef d’œuvre d’émotion. On pleure, on rit et on communie avec chacun des protagonistes de cette magnifique fiction. Dans cet Israël du début des années 80, on suit les aventures d’Erez, de son jumeau Ofer et de la jeune fille dont tous deux vont tomber amoureux : Neta. Pour chacun de ces jeunes gens, c’est la fin de l’innocence. Erez et Ofer doivent renoncer à l’insouciance pour faire des choix d’hommes. S’occuper de leur famille, servir leur pays en guerre avec les « Arabes ». Le premier conflit vécu en direct à la télévision, qui éclate en 1982 au moment où l’armée israélienne bombarde les positions de l’Organisation de libération de la Palestine (l’OLP) au Liban, fait comprendre à tout un pays que les responsabilités sont partagées avec les ennemis de toujours, considérés aussi comme tels au sein de la famille Levi.
La politique en filigrane, Mes plus belles années célèbre les relations familiales dans tout ce qu’elles ont de complexe. Ofer aime assez son frère pour ne pas imposer à Erez de devoir rester auprès d’un père qui a besoin de sa présence. Mais il n’en demeure pas moins qu’il reprochera à son jumeau de l’avoir laissé faire. Erez aime Neta, mais il fera tout pour préserver sa relation avec son frère. Mes plus belles années, ce sont aussi des parents sensibles aux rêves et aux aspirations de leurs enfants, prêts à tout pour préserver leur progéniture. Mais également capables de commettre les pires erreurs. Les dialogues de Sima (Orly Silberschatz) avec ses jumeaux ou son mari, à des moments cruciaux de la vie familiale, sont bouleversants de véracité.
Avec Mes plus belles années, Reshef Levi retranscrit également l’atmosphère de toute une époque, qu’il annonce dès les premières images du film avec celles de Lost Islands (le titre original de ce long métrage). La série a scotché beaucoup d’Israéliens devant leur petit écran dans les années 80. La bande originale contribue aussi à ce dépaysement temporel. Grâce à un casting hors-pair – Michael Moshonov (Erez) et Schmil Ben Ari (Avraham, le père), ont reçu respectivement le prix du meilleur acteur et du meilleur acteur dans un second rôle, lors des Israeli Film Academy Awards, le film de Reshef levi arrive à toucher du doigt l’essence de cette famille israélienne. Faire front commun, et surtout faire des sacrifices quand ils sont nécessaires. Le propre de toutes les familles du monde, sublimé par une réalisation juste et attentive à un scénario riche et subtil. Mes plus belles années, un délice, tout simplement.