Fin de siècle

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Comme on aimerait croire à une belle histoire d’amour…

Belles images et corps vigoureux

Voici un nouveau film qui, si c’était nécessaire, prouve encore une fois la belle vivacité du cinéma argentin qui milite dans tous les sens du terme. C’est le premier long métrage de Lucio Castro, après un court, Trust Issues, remarqué au festival de Cannes en 2018. Belles images, beaux visages, corps musculeux, ambiance sexy, tout est là pour aider à faire fantasmer sur la quête de l’amour impossible. Malheureusement, un sentiment étrange de déjà-vu nous assaille parce qu’il est impossible de ne pas faire la comparaison avec le long métrage, Le colocataire de l’Argentin Marco Berger sorti il y a seulement trois mois. Il semblerait donc que le marché des amours homosexuelles masculines soit porteur et le foisonnement des festivals qui leur sont dédiés en serait une preuve. Ici, comme dans Le locataire, et comme pour prouver qu’il suffit de traverser la rue pour trouver le grand amour gay, le film de Lucio Castro raconte encore une histoire improbable mais très sentimentale de la rencontre entre deux (beaux) jeunes hommes que rien ne disposait à la rencontre amoureuse et qui vont vivre une belle histoire d’amour sur des années. Le quotidien est souvent bien plus terne pour la plupart des gays qui sont même parfois harcelés, punis, emprisonnés, voire condamnés à mort dans certains pays qui considèrent l’homosexualité comme un crime. Mais le cinéma, on le répète, est une usine à rêves, alors pourquoi pas ?

 

 

Combler les vides de la narration

Le synopsis nous prévient dès le départ : un Argentin de New York et un Espagnol de Berlin se croisent une nuit à Barcelone. Ils n’étaient pas faits pour se rencontrer et pourtant… Après une nuit torride, ce qui semblait être une rencontre éphémère entre deux inconnus devient une relation épique s’étendant sur plusieurs décennies. Le thème du film est campé en quelques mots, il va falloir combler les vides de la narration. Le film est le témoin en fait de nos solitudes dans les grandes villes où les gens se croisent sans vraiment se voir, jusqu’au moment magique où deux êtres se rencontrent surtout lorsqu’ils se connaissaient déjà. Cela provoque un sentiment de mélancolie mêlé d’espoir comme si tout était possible dans l’existence, alors que nous en sommes bien éloignés dans la vraie vie. Le réalisateur s’en explique dans la dossier de presse du film : « Au début de Fin de Siècle, il y a presque treize minutes où Ocho déambule dans la ville, sans dialogue. Cela crée un contraste avec le reste du film, qui est assez basé sur le dialogue. Quand les deux personnages commencent à parler, cela ouvre un dialogue ininterrompu, qui dure jusqu’à la fin. »

 

« Donner ce qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas »

Silence/dialogue, voici les deux extrêmes de ce film qui parle à l’inconscient et nous murmure qu’il n’est pas nécessaire de se parler pour s’aimer et présente l’amour comme une chose possible alors que le contraire fait loi. Retour nécessaire alors sur la pensée géniale de Jacques Lacan qui avait fort marqué les esprits avec sa définition de l’amour : « Donner ce qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas ». Ici, nous sommes aux antipodes de cette assertion de psychanalyste mélancolique et masochiste. Les corps et les attitudes sont magnifiés comme dans une collection de prêt-à-porter ou de sous-vêtements sexy comme pour faire l’apologie de l’amour qui, normalement, est sans issue. Et pourtant non, le film se présente comme un hymne à l’amour surtout physique, pourquoi pas ? « Le sexe a un rôle très important dans le film, déclare le réalisateur dans le dossier de presse. Je voulais que les scènes d’amour paraissent très crédibles. Tout était bien préparé, on a chorégraphié les scènes en amont, et le rendu était plus intense. Les acteurs connaissaient l’angle de la caméra, ils savaient ce que les spectateurs allaient voir. C’était plus facile à tourner. »

Titre original : Fin de siglo

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Durée : 84 mn


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