Divorce à l’italienne

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Sicile, 1963 : le divorce est interdit en Italie, pays où les crimes passionnels sont si nombreux que la justice finit par se montrer étonnamment clémente envers ceux qui se chargent personnellement de punir les adultères…

Trois ans après La Dolce Vita, nous retrouvons un Marcello Mastroianni maîtrisant au-delà de la perfection son rôle de mari ennuyé dans Divorce à l’italienne, comédie de mœurs magistralement menée par le réalisateur Pietro Germi.

Le Comte Ferdinando Cefalu (Mastroianni) n’est plus amoureux de sa femme Rosalia (Daniela Rocca), qui l’insupporte jusqu’à l’exaspération. En revanche, il idolâtre sa très jeune cousine Angela (Stéfania Sandrelli), laquelle répond favorablement à ses avances. Pour le Comte, il n’y a aucun doute : il faut éliminer sa femme pour atteindre Angela. La méthode est vite choisie : se faire tromper par sa femme dans le but de la tuer lorsqu’il la découvrira dans les bras de son amant.

Trois à sept ans de prison pour le mari qui tue sa femme adultère dans les années soixante italiennes, de quoi rendre vraisemblable le scénario du film de Germi. L’intrigue repose sur le passage à l’acte du Comte Cefalu, petit noble appauvri d’un village sicilien de 18 000 habitants. Au long du film, cette satire sociale devient de plus en plus vraisemblable pour le spectateur, lequel est entraîné sans peine par une action très bien rythmée et des dialogues débordant d’humour noir.

Ainsi, le jeu des deux acteurs principaux, Mastroianni et Rocca, est à la hauteur du ton satirique souhaité dans Divorce…, car ils réussissent à donner une vie réelle à leur personnage tout en jouant la parodie exagérée.

Nous remarquons par ailleurs le « portrait de société » des habitants du village. A travers des plans assez serrés sur des groupes de personnages donnés (les membres respectables du club du Cercle, les femmes endimanchées à l’Église, etc.), le réalisateur présente ce petit univers tout au long du film en nous invitant à regarder de plus près les détails qui en ressortent. Le décor humain qui en découle prend la place du chœur dans la tragédie antique, puis finit par acquérir le rôle d’instigateur de l’action qui se développe autour des trois personnages principaux.

Divorce à l’italienne revisite de façon originale clichés et préjugés autour du mariage pour mieux les tourner en dérision, et nous oblige pour le coup à nous rappeler de la belle époque où l’industrie du cinéma italien était plus que florissante.

Titre original : Divorzio all'italiana

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Durée : 105 mn


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