Même s´il n´apporte rien de neuf au film de zombies, Yeon Sang-Ho signe un divertissement efficace.
Un camion écrase une biche qui meurt sur le coup avant de se relever, l’œil vitreux, les articulations désordonnées et l’air passablement énervé : le patient zéro d’un virus inconnu capable de transformer le plus gentil des herbivores en zombie mangeur d’hommes. L’épidémie va se répandre à travers la Corée du Sud, aussi rapidement que les messages officiels niant son existence. Il suffira d’une passagère infectée pour causer la terreur parmi les voyageurs du train KTX reliant Séoul à Busan, ville dont les rumeurs disent qu’elle ne serait pas touchée par la maladie.
Présenté hors-compétition cette année à Cannes, en Séance de Minuit, Dernier train pour Busan est la première réalisation en prise de vue réelle de Yeon Sang-Ho après trois films d’animation (The King of Pigs, 2011 ; The Window, 2012 et The Fake, 2013). Quant au choix du zombie pour ce baptême du feu, il est motivé, selon les dires du cinéaste, par l’envie de « montrer un genre qu’on n’aurait jamais vu dans le cinéma coréen », malgré l’avance prise dans ce domaine par le très bon The Strangers (Na Hong-Jin, 2016) dans les salles françaises. Le zombie coréen justement ne se distingue pas vraiment de ses congénères étrangers, dont il a semble-t-il suivi l’évolution. S’il suffisait autrefois d’accélérer légèrement le pas pour semer un mort-vivant, être dans une forme olympique est aujourd’hui impératif afin d’espérer lui échapper. ADSL, messagerie instantanée, lignes à grande vitesse, l’apathie originelle des zombies était devenue un anachronisme dans un monde dominé par la rapidité. 28 jours plus tard (Danny Boyle, 2003) les voyait courir, World War Z (Marc Forster, 2013) les avait transformés en tsunami monstrueux que Dernier Train pour Busan canalise donc dans un train lancé, lui aussi, à vive allure. De par le choix d’un tel lieu, le film fait forcément penser à Snowpiercer (Bong Joon-Ho, 2013) mais la ressemblance s’arrête ici. Là où ce dernier rassemblait toute l’humanité dans un train qui s’avérait être avant tout une parabole, Yeon Sang-Ho ne prend qu’un échantillon représentatif de cette humanité pour livrer un divertissement efficace (où affleure cependant une dimension sociale).
Face à la horde de prédateurs qui, à l’instar d’un Tyrannosaure, sont seulement sensibles aux mouvements, se débat un groupe de personnages archétypaux en lutte pour la survie : un père égoïste, gestionnaire d’actifs, que son travail accapare au point de négliger son altruiste petite fille, une femme enceinte et son mari tout en muscles, un groupe de lycéens ou encore deux sœurs âgées. Le seul à tracer sa route en solitaire, quitte à envoyer des passagers se faire manger à sa place, est un chef d’entreprise adepte du chacun pour soi. Contaminé par l’individualisme (si ce n’est le darwinisme social), l’homme est déjà devenu un zombie pour l’homme. Le réalisateur pose donc ici la solidarité comme condition de survie, c’est la leçon qu’apprendront les protagonistes à la fin de leurs parcours respectifs. L’absence de surprises, que ce soit dans la trajectoire ou la caractérisation des personnages (le père absent fait penser au Ray de La Guerre des Mondes – Steven Spielberg, 2005), n’est jamais une source de frustration puisque la mise en scène remplit nos attentes. Alors même qu’un train est un espace pour le moins monotone, les scènes d’action s’enchaînent et varient d’une voiture à l’autre ; toilettes, sas, porte-bagages, motrices, tous les coins et recoins sont exploités au gré des courses poursuites et des parties de cache-cache. Chose appréciable, les coups de poings échangés ne sont pas systématiquement ponctués de punchlines destinés à recueillir le label « trop cool ».
Etre dans le train est un cauchemar mais en sortir l’est aussi car le danger règne partout, même Busan n’offre qu’un vague pari sur l’avenir ; il est alors dommage que ce survival se termine soudain en mélodrame après une ultime zombification en forme d’épiphanie.
Autopsie grinçante de la « dolce vita » d’une top-modèle asséchée par ses relations avec des hommes influents, Darling chérie est une oeuvre générationnelle qui interroge sur les choix d’émancipation laissés à une gente féminine dans la dépendance d’une société sexiste. Au coeur du Londres branché des années 60, son ascension fulgurante, facilitée par un carriérisme décomplexé, va précipiter sa désespérance morale. Par la stylisation d’un microcosme superficiel, John Schlesinger brosse la satire sociale d’une époque effervescente en prélude au Blow-up d’Antonioni qui sortira l’année suivante en 1966.
En 1958, alors dans la phase de postproduction de son film et sous la pression des studios Universal qualifiant l’oeuvre de « provocatrice », Orson Welles, assiste, impuissant, à la refonte de sa mise en scène de La soif du mal. La puissance suggestive de ce qui constituera son « chant du cygne hollywoodien » a scellé définitivement son sort dans un bannissement virtuel. A sa sortie, les critiques n’ont pas su voir à quel point le cinéaste était visionnaire et en avance sur son temps. Ils jugent la mise en scène inaboutie et peu substantielle. En 1998, soit 40 ans plus tard et 13 ans après la disparition de son metteur en scène mythique, sur ses directives, une version longue sort qui restitue à la noirceur terminale de ce « pulp thriller » toute la démesure shakespearienne voulue par l’auteur. Réévaluation…
Lundi 7 juillet, au cours d’une cérémonie à la cinémathèque française, un long métrage et un court métrage se verront attribués le prix Jean Vigo, 2025. Wang Bing sera également récompensé pour l’ensemble de son œuvre.
L’anthologie du suspense et de l’humour orchestrée par Sir Alfred Hitchcock. 268 histoires courtes – dont un grand nombre d’inédits- à dévorer sans modération.