Le 7eme et le 14 ème arrondissements de Paris, Guy Marchand et Marie-France Pisier, Louis-Léaud-Garrel et autres références à la Nouvelle Vague concordent pour que Dans Paris réjouisse les uns et agace les autres. Revendiquant clairement ses influences, Christophe Honoré s´empare d´une forme imposée pour toucher le spectateur par sa propre singularité. Une chose est sûre, la force à la fois mélancolique et joyeuse de Dans Paris permet de trouver un juste milieu entre passé et présent.
C´est donc par un prologue incongru et littéraire -très Nouvelle Vague- que Louis Garrel, déclaré narrateur du film, expose la trame de l´histoire. Jonathan pérégrine dans Paris au gré de ses rencontres féminines tandis que Paul, son frère aîné, déprime dans l´appartement de leur papa-poule. Bien qu´antagonistes, l´un hâbleur et turbulent, l´autre calme et mélancolique, ils sont unis par le souvenir d´une soeur défunte à 17 ans.
Dans Paris est indubitablement un film de famille, de la Nouvelle Vague assurément, puis de Paul et Jonathan. Le spectateur, ayant conscience de cet héritage, peut désormais se concentrer sur le film et son histoire. Sa force réside dans des personnages maladroits et inaptes à communiquer. Ils se taisent de peur d´exprimer leurs angoisses, de froisser leurs proches et de faire ressurgir une douleur passée. Pour retranscrire cette gêne, le réalisateur met en image et en musique les émotions de ses personnages. Sans misérabilisme ni pathos, il parvient à insuffler une puissance émotive. Par une lumière tamisée et nocturne, dans les tons ocres, Christophe Honoré rapproche le spectateur de ces êtres perdus. On est, sans le comprendre ni le savoir, emporté dans un bain de mélancolie couronné par la gaieté loufoque de Jonathan. Car l´autre prouesse de Dans Paris est de ne jamais tomber dans la tristesse, mais de toujours montrer le côté doux-amer de la vie et de nous porter grâce aux sentiments à fleur de peau. Pour y contribuer, la musique joue un grand rôle. Quelle soit grunge ou jazzy, chantée ou seulement écoutée, elle est sans aucun doute un personnage à part entière, attachée aux protagonistes et source de rapprochement.
Loin d´être un film musical, Christophe Honoré, d´abord écrivain, intègre sa plume dans les dialogues qui le caractérise : longs, récités, noirs et tendres. Tout autant que les images intimistes, les mots et les gestes anodins touchent avec justesse. Un monologue de Paul sur la tristesse, marque de naissance comme la couleur des yeux, est une charge en plein coeur autant que les répliques sèches et maladroites de Jonathan à l´égard de son père inquiétant et bienveillant. Magie et harmonie entre paroles, images et musique.
Avec sa culture cinéphile et sa singularité, Christophe Honoré signe un film bouleversant, intimiste, où la mélancolie est baignée dans l´élégance et le burlesque, sous l´oeil envoûtant d´une bande-son signée Alex Beaupain.
Ce DVD ne comporte que très peu de bonus mais la qualité ne leur fait pas défaut. Le réalisateur livre donc les clés de son film au journaliste Jean-Luc Lalanne des Inrockuptibles, tandis que Louis Garrel questionne gentiment des américains sur le cinéma français. Enfin, une scène coupée dévoile le peu de perte de Dans Paris.