Cannes 2018, jour 3

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Les films s’enchaînent dans le Grand Théâtre Lumière, le monde s’agite à Cannes pour une édition très cinéphile comme on le rappelait hier. Et ce matin, en cette troisième journée, un film en Compétition est venu arrêter le temps. D’une beauté rare, « Cold War » de Pawel Pawlikowski (Ida) m’a bouleversé.

Cold War, l’amour à la Polonaise

Qu’il est rare, pendant le festival, de se laisser entraîner dans une histoire d’amour filmée en noir & blanc, entre la Pologne, la France, la Yougoslavie et l’Allemagne, dans les années 50. Ce réalisateur, Pawel Pawlikowski, nous y invite. Un film brillant, comme Ida quelques années plus tôt. Pendant la guerre froide, entre la Pologne stalinienne et le Paris bohème des années 1950, un musicien épris de liberté et une jeune chanteuse passionnée vivent un amour impossible dans une époque impossible.

Avec un romantisme très propre à ce réalisateur, une douceur et deux acteurs très beaux dans leur histoire d’amour, c’est une carte postale de la Pologne et des pressions sociales et politiques qui pèsent sur ce pays, à cette époque. Entre chants et dialogues, on tombe forcément sous l’émotion de ces êtres qui ont vécu en fuite, entre passion musicale, amours compliqués et vie à construire. Sans être niais ou cliché, Pawel Pawlikowski signe un très beau film qui sera forcément récompensé à Cannes. Du moins, on l’espère. Sortie prévue dans nos salles le 31 octobre 2018.

 

 

 

L’Ange de Luis Ortega : le film le plus cool de la Croisette ?

Luis Ortega, réalisateur Argentin que l’on connaît pour ses films El Marginal et Caja negra, débarque à Cannes dans la sélection Un Certain Regard avec une bombe cinématographique. Né dans une famille d’artistes, il puise son inspiration dans ses racines. Pour son film L’Ange, ce réalisateur débordant de talent infuse sa production de son histoire, en particulier de son passé. Dans son dernier film, il projette une farouche volonté de rendre les jeunes plus cools, peut-être même les plus cools de Cannes. Buenos Aires, dans les années 70, Carlitos est un adolescent de 17 ans au visage d’ange à qui personne ne résiste. Ce qu’il veut il l’obtient. Au lycée, sa route croise celle de Ramon. Ensemble ils forment un duo trouble au charme vénéneux. Ils s’engagent sur un chemin fait de vols, de mensonges où tuer devient bientôt une façon de s’exprimer…
 
Lorenzo Ferro et Chino Darin (le fils de Ricardo Darin) forment un couple de jeunes rebelles à l’écran formidable. Cette histoire, inspirée de faits réels et de l’existence d’un jeune homme tueur au physique de James Dean, est étonnante. Mais ce qui est encore plus surprenant, c’est la qualité mise en oeuvre dans l’enchaînement des plans, de manière très cut et drôles, avec un montage parfait, une bande son extraordinaire et une capacité à capter la beauté dans les moindres détails de ses personnages. Autant dire que ce film m’a plu. Aucune date pour le moment programmée pour sa sortie en France.

 

 

 

Jia Zhang-Ke et sa fresque de l’amour à la Chinoise
À l’inverse de Cold War, le réalisateur chinois Jia Zhang-Ke propose avec son film Les éternels à Cannes (et en Compétition Officielle), une fresque sur une longue période sur l’amour, la Chine, ses traditions et ses règlements de compte. En 2001, la jeune Qiao est amoureuse de Bin, petit chef de la pègre locale de Datong. Alors que Bin est attaqué par une bande rivale, Qiao prend sa défense et tire plusieurs coups de feu. Elle est condamnée à cinq ans de prison. A sa sortie, Qiao part à la recherche de Bin et tente de renouer avec lui. Mais il refuse de la suivre. Dix ans plus tard, à Datong, Qiao est célibataire, elle a réussi sa vie en restant fidèle aux valeurs de la pègre. Bin, usé par les épreuves, revient pour retrouver Qiao, la seule personne qu’il ait jamais aimée…

 

Le film prend le temps de nous entraîner dans une Chine qui nous semble lointaine, celle de la pègre, de la prison, des villages. La peinture est onorique mais s’efface avec la longueur de la réalisation, 2h30 pour suivre le chemin parcouru pour cette femme, en quête d’amour et de reconnaissance. Le propos aurait pu être traité de façon plus synthétique. Malgré cela, on trouve dans le cinéma de Jia Zhang-ke une force dans sa simplicité à construire ses personnages, sans trop en dire, mais les laissant vivre et évoluer au fil des séquences. Avec une certaine poésie, le réalisateur n’en dit pas trop pour laisser au spectateur le choix de s’y attacher ou non. Et quelques scènes du folklore chinois, passant par le chant, valent vraiment le détour.


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