Bienvenue au cottage (The cottage)

Article écrit par

De quoi perdre un peu la tête…

Crade! Ce mot pourrait à lui seul donner une idée de ce qu’est en l’état Bienvenue au cottage, second long-métrage de Paul Andrew Williams, succédant à London to Brighton, sorti ici l’an dernier. Suivant les péripéties nocturnes d’un duo de frères kidnappeurs pas très malins (joués par Andy Serkis, le Gollum du Seigneur des Anneaux, grand garçon costaud « en vrai » et le sympathique Reece Shearsmith), le film passe sans prévenir de l’efficace comédie anglaise avec répliques qui tuent au pur déferlement gore. Le plaisir est constant, mais variable. A la réception amusée des diverses informations clarifiant leur embarrassante situation (ils ont enlevé la fille du patron de l’un des gaillards… qui risque donc de le reconnaître à la moindre maladresse) succède l’inexprimable plaisir suscité par une horreur croissante.

Loin d’être en recherche d’une quelconque « crédibilité », d’une moindre justification de ses débordements, le cinéaste a pour mérite d’assumer la portée profondément gratuite de ses effets. Bienvenue au cottage dispose certes d’un récit, parvient certes à préserver de bout en bout une certaine tenue narrative, mais là n’est bien sûr pas le plus important. Intéresse surtout la clarté de ses enjeux, l’honnêteté d’un objet ne cherchant jamais à insinuer plus qu’il ne donne à voir. Tout ce qu’il y a à comprendre, c’est que ce que vous voyez ne cache aucun double fond, ne dissimule aucun message critique ou philosophique. Prenez-vous en plein les yeux, réagissez selon votre sensibilité (excitation face à la surenchère ou irrémédiable rejet) et poursuivez votre chemin.

C’est pour cela que, sans surprendre ou même « emballer » plus que de raison, le film semble au final très cohérent, plutôt abouti. Pas le moindre ego d’auteur à l’horizon, juste le souci de donner le change à un public sans doute demandeur, tout du moins un peu prévenu. Le « bienvenue » du titre français est à prendre pour ce qu’il est : l’expression d’un accueil complice, d’une invitation à prendre son aise dans le bain d’un délire certes un peu potache, jamais très fin, mais généreux. Reste que c’est tout de même vraiment très crade…

Titre original : The Cottage

Réalisateur :

Acteurs : , ,

Année :

Genre :

Durée : 92 mn


Partager:

Twitter Facebook

Lire aussi

Dersou Ouzala

Dersou Ouzala

Oeuvre de transition encensée pour son humanisme, « Dersou Ouzala » a pourtant dénoté d’une espèce d’aura négative eu égard à son mysticisme contemplatif amorçant un tournant de maturité vieillissante chez Kurosawa. Face aux nouveaux défis et enjeux écologiques planétaires, on peut désormais revoir cette ode panthéiste sous un jour nouveau.

Les soeurs Munakata & Une femme dans le vent.Sortie Blu-ray chez Carlotta, le 19 mars (OZU, 6 films rares ou inédits).

Les soeurs Munakata & Une femme dans le vent.Sortie Blu-ray chez Carlotta, le 19 mars (OZU, 6 films rares ou inédits).

Dans l’immédiat après-guerre, Yasujiro Ozu focalisa l’œilleton de sa caméra sur la chronique simple et désarmante des vicissitudes familiales en leur insufflant cependant un tour mélodramatique inattendu de sa part. Sans aller jusqu’à renier ces films mineurs dans sa production, le sensei amorça ce tournant transitoire non sans une certaine frustration. Découvertes…

Dernier caprice. Sortie Blu-ray chez Carlotta, le 19 mars (OZU, 6 films rares ou inédits).

Dernier caprice. Sortie Blu-ray chez Carlotta, le 19 mars (OZU, 6 films rares ou inédits).

Le pénultième film d’Ozu pourrait bien être son testament cinématographique. Sa tonalité tragi-comique et ses couleurs d’un rouge mordoré anticipent la saison automnale à travers la fin de vie crépusculaire d’un patriarche et d’un pater familias, dans le même temps, selon le cycle d’une existence ramenée au pathos des choses les plus insignifiantes. En version restaurée par le distributeur Carlotta.

Il était un père. Sortie Blu-ray chez Carlotta, le 19 mars (OZU, 6 films rares ou inédits).

Il était un père. Sortie Blu-ray chez Carlotta, le 19 mars (OZU, 6 films rares ou inédits).

Difficile de passer sous silence une œuvre aussi importante que « Il était un père » dans la filmographie d’Ozu malgré le didactisme de la forme. Tiraillé entre la rhétorique propagandiste de la hiérarchie militaire japonaise, la censure de l’armée d’occupation militaire du général Mac Arthur qui lui sont imposées par l’effort de guerre, Ozu réintroduit le fil rouge de la parentalité abordé dans « Un fils unique » (1936) avec le scepticisme foncier qui le caractérise.