Au menu de l´Etrange Festival 2011

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Du lourd, de l´inédit, de l´attendu : bastion des films de genre en tous genres, l´Etrange Festival investit une nouvelle fois le Forum des Images pour une semaine de cinéphilie exigeante et réjouissante. À table !

La nouvelle édition de l’Étrange Festival, qui débute ce vendredi 2 septembre au Forum des Images de Paris, arrive dans une période d’engouement sans précédent pour le cinéma de genre. Gérardmer n’est plus un phare cotonneux dans un paysage de morne plaine : les manifestations dédiées au fantastique, au thriller, à l’horreur ou à l’expérimental n’ont jamais été aussi nombreuses en France. À Strasbourg, Lyon, Nantes, Tours, des équipes de passionnés, brûlant d’un amour immodéré pour le 7e art bis, ont mis sur pied, et sans doute pour de bon, des rendez-vous essentiels pour faire vivre cette cinéphilie un brin rebelle.

Car un regard au programme pantagruélique concocté par Frédéric Temps et ses étranges bénévoles suffit pour le constater : ce que vous verrez au Forum des Images en septembre, ou bien en province si vous avez la chance d’habiter les villes sus-citées, vous ne le verrez probablement pas au cinéma. Trop autre. Trop sanglant. Trop unique, ou inclassable. L’année 2011 a confirmé cette propension terrible, inéluctable, des distributeurs à sacrifier la carrière salles de leurs productions, celle pour laquelle des millions d’euros ou de dollars ont été investis, pour lui préférer la rentabilité immédiate de la VOD, la vente ou la location au distributeur Vidéo Future du coin. Le grand prix de Gérardmer, Bedevilled, en est une preuve. Le grand prix du festival du film policier de Beaune, The man from nowhere, connaîtra le même sort. Coïncidence ? Ces deux films ont ou vont être programmés aux Halles.

De la Belgique underground à l’Inde futuriste

Les avant-premières prévues du 2 au 11 septembre, sont donc autant de chances de découvrir dans les meilleures (les bonnes, en fait) conditions ces perles dont les multiplexes ne veulent plus se repaître. Production Guillermo del Toro, Don’t be afraid of the dark et sa maison hantée sont d’autant plus attendus qu’aucune date de sortie n’est annoncée chez nous. Même son de cloche pour le film d’ouverture post-apocalyptique The Divide, réalisation qui confirmera on l’espère le talent pour l’heure relatif du frenchy Xavier Gens. Comme l’an passé, la sélection est aussi exotique que judicieuse, et balance entre « buzz » attendus et petites productions intrigantes : polar flamand et agricole (Bullhead), polar politique coréen (The Unjust), anime énervé (Redline), drame climatique étrangement d’actualité (Take Shelter), blockbuster indien (Endhiran), thriller trash venu de Hong-Kong (Revenge : a love story), huis-clos qu’on dit insoutenable (The Woman), les derniers Sono Sion (Cold Fish et Guilty of Romance)… Direct-to-dvd certifiés malgré leurs vraies qualités, Super et Stake Land (on en parlait ici) sont des séries B indé avec un ton unique, à ne pas manquer.

La liste de ces inédits est longue, et s’allonge jusqu’au vertige lorsqu’on s’intéresse aux sélections parallèles, peuplées comme il se doit de pépites étranges (The Thief, polar entièrement muet de 1952), de cartes blanches données au trublion Jean-Pierre Mocky ou au pape du docu music Julian Temple (c’est l’occasion de découvrir en salles ce terrible film de guerre qu’est Requiem pour un massacre), de ciné-concerts où se produira entre autres Marc Caro, et de deux nuits blanches aussi folles que sanglantes : l’une est consacrée à l’univers Grindhouse, avec Hobo with a shotgun et Tucker & Dale vs Evil, l’autre au studio punko-gore japonais Sushi Typhoon (on en parlait à la même adresse).

Le regard bleu de Rutger

Question invités de marque, on notera une journée très attendue à passer en compagnie du hollandais Rutger Hauer, dont le magnétique regard hante toujours nos souvenirs d’enfants biberonnés aux films cultes de sa jeunesse (Blade Runner, Soldier of Orange, Spetters, ainsi que La Chair et le Sang et Hitcher, diffusés pour l’occasion).

Les compétitions longs et courts-métrages seront toujours de la partie, tout comme les rencontres avec les réalisateurs invités pour présenter leurs œuvres : Xavier Gens, Agnès Merlet, Douglas Buck, Ben Wheatley, Yoshihiro Nishimura, Richard Stanley, etc.

En tout, plus de soixante projections sont prévues pendant dix jours. C’est beaucoup, mais c’est aussi ça qui fait le prix d’un bon festival : on veut tout y voir sans y parvenir, tout simplement parce que tout y est intéressant. Ce qui n’est pas un mince exploit, non ?

Programme complet sur www.etrangefestival.com


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