Salon Parisfx : « Conversation with… » Michel Gondry

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Le réalisateur français était l’un des invités d’honneur de ce rendez-vous consacré à la création numérique. L’occasion pour lui de revenir sur sa carrière à travers quelques extraits de films, d’évoquer sa vision des effets spéciaux et présenter en exclusivité une version « suédée » de « Taxi Driver ».

Les 14 et 15 décembre se tenait à l’Espace Pierre Cardin la 5e édition du Salon Parisfx, rendez-vous incontournable réunissant les amateurs et professionnels des effets visuels, des images de synthèse, de l’animation et de la 3D. Cet évènement a ainsi vocation à couvrir l’ensemble du champ de la création numérique et affirmer son rôle déterminant dans la production audiovisuelle et cinématographique en France. C’est au coeur de ce programme que Michel Gondry, oscarisé en 2005 pour le scénario d’Eternal Sunshine of the Spotless Mind et réalisateur de The Green Hornet, sorti en tout début d’année, était invité à participer à une session d’échange avec le public, malheureusement écourtée en raison de retards et de nombreux problèmes techniques (sic). Mais fidèle à lui-même, c’est en toute décontraction et avec son franc-parler habituel qu’il est revenu sur son travail et notamment la variété plastique des effets spéciaux créés pour ses films.
 

 
Effets "normaux" ou effets spéciaux ?
 
On pouvait légitimement s’étonner de la présence du réalisateur dans un tel festival. Connu pour ses méthodes artisanales – « arty » diront les mauvaises langues – sur les effets visuels, Gondry semble en décalage avec les technologies couramment employées dans le cinéma actuel. « Je n’aime pas tourner en incrustation, confirme-t-il. J’ai fait beaucoup de bleu incrust, mais au bout d’un moment j’en ai eu ras-le-bol. D’ailleurs, sur The Green Hornet, on y a passé une semaine pour une scène de voiture et à la fin j’étais déprimé. Cela dénature le jeu des acteurs parce qu’il leur est plus difficile de s’imaginer les scènes. C’est pour cette raison que j’essaye d’apporter le plus de réel, même avec des fonds verts ou bleus. » Il concède cependant avoir recours aux CGI (les images de synthèse en français dans le texte) de temps en temps : « Les effets numériques de post-production ne sont intéressant que s’ils permettent de créer quelque chose qu’on n’aurait pas pû faire autrement. Malheureusement, on s’en sert plus souvent par paresse. » De ce point de vue, le réalisateur assume totalement le fait d’être à contre-courant : « Je sais qu’il y a un côté un peu démodé dans ma manière de fonctionner. Mais sur La Science des rêves par exemple, ça correspondait bien à ce que je voulais montrer. C’était important que les comédiens puissent voir les éléments s’animer autour d’eux et qu’ils n’aient pas à jouer devant du bleu et un décor vide. » Il s’en amuse même : « On me surnomme Monsieur Carton. À tel point que les éditeurs de DVD se croient obligés d’en mettre partout dans les menus ! »
 
Au fil du temps, Gondry a appris à trouver les solutions aux problèmes techniques rencontrés sur les tournages. « J’utilise les limites, de budget notamment, comme des avantages. Dans Eternal Sunshine, j’ai joué sur les ellipses, les flash-forward, sur des effets de montage plus angoissants et plus saisissants que des effets numériques qui auraient coûté cher en plus d’être trop intellectualisés. Pour métaphoriser la mémoire, j’ai filmé pendant la nuit avec des lumières frontales, créant un effet spot. » Il reste néanmoins lucide sur la possibilité d’imposer ses idées dans le giron hollywoodien : « C’est forcément plus compliqué sur un budget de 140 millions de dollars, comme avec The Green Hornet. Au montage, il fallait écouter l’avis de dix personnes avant que je puisse donner le mien. » Pour autant, il ne serait pas forcément contre retravailler sur un blockbuster, « à condition de pouvoir s’éclater un peu plus ».

En ce qui concerne ses projets, outre l’installation de son Usine de films amateurs à Aubervilliers, Gondry peaufine The We and the I, un film qui se passe dans le Bronx et raconte le voyage en bus d’un groupe de lycéens après leur dernier jour de classe de l’année. « Le voyage permet d’installer les relations entre les personnages. Au début, ils sont tous odieux les uns avec les autres, et au fur et à mesure que les jeunes descendent du bus, les rapports changent, de nouvelles dynamiques se créent au sein du groupe jusqu’à ce qu’il n’en reste plus que deux » confie le réalisateur, qui travaille également sur l’adaptation de L’Écume des jours, avec Audrey Tautou et Romain Duris au casting. Pour clore cette session, il livrait en exclusivité un Taxi Driver"suédé", dans la lignée des hommages fauchés et loufoques popularisés avec son Be Kind Rewind.


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