Pour une femme

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Un film guère emballant, mélodrame sur fond d´après guerre, mélange approximatif de genres qui accumule les facilités

Pour une femme est un film romanesque ayant pour cadre le contexte de la France d’après-guerre. Lena est mariée à Michel, lui l’a aimée comme un fou dès leur première rencontre, tandis qu’elle a appris à l’aimer, n’acceptant le mariage que pour échapper aux camps. Un beau jour, Jean, le frère de Michel, débarque dans leur vie alors que sa famille le croyait mort. Un solide gaillard, sombre et mystérieux, aux activités et aux fréquentations un peu louches, mais qui jure être « du bon côté ». La romance entre Lena et Jean progresse, grandissante, inexorable, tandis que l’on découvre au fur et à mesure la personnalité et l’histoire des protagonistes.
 
 
Ce n’est pas tant le scénario du film qui déçoit (rien d’original certes, mais il y avait de quoi faire), mais plutôt le traitement qui en est fait. Un bon, franc et massif mélodrame eut été copieux mais digeste, mais un film d’amour, doublé d’un film sur l’émancipation féminine, triplé d’un film d’action, quadruplé d’un film sur la filiation… À tout vouloir, le film s’égare et atteint vite le point de non-retour. Le récit décroche d’un personnage à l’autre, d’une histoire à une autre, d’un lieu à un autre, d’une temporalité à une autre, avec un liant trop artificiel pour susciter quelconque intérêt, restant à l’état embryonnaire dans tout ce qu’il entreprend.
 

On ne comprend ainsi pas l’intérêt de raconter l’histoire sur le mode du flash-back (Anne, la fille de Lena, découvre la véritable histoire de sa mère, et le récit qui nous en est fait est probablement hérité de la vision qu’en a Anne). On ne comprend pas non plus les retours au présent nous donnant à voir des séquences entre le père et ses filles. Soit il fallait donner une véritable place aux personnages secondaires des filles, en creuser la psychologie, jouer sur l’image fantasmée qu’elle se faisait de leur mère, soit il fallait se servir du flash-back comme d’une simple accroche narrative, en reléguant par exemple les filles au rang de voix off. En l’état, les séquences dans le présent ne sont pas convaincantes, coupant un rythme déjà pas bien élevé. Ce qui est embêtant pour un film qui lorgne du côté du film d’action…
 
L’action est centrée autour du personnage de Jean, le beau-frère viril dont on ne sait rien. On apprendra sur le tard le bien-fondé de son entreprise : il était effectivement un justicier sans peur et sans reproche. L’action s’emballe sans qu’on ne s’y attende vraiment, impulsée par l’histoire d’amour entre les deux héros, mais tout cela manque de souffle, le feu étant étouffé par le manque d’authenticité de l’histoire (des histoires) décrite(s). Le personnage de Jean est sacrifié sur l’autel de la romance. Pour une femme est à ce titre une ode à une femme avant toute chose. Un film sur le courage d’une femme, sur son émancipation avortée, sur l’amour sacrifié. Malheureusement, l’interprétation lacunaire de Mélanie Thierry ainsi que les clichés entretenus par le film dans la description qu’il nous fait de l’amour naissant rendent le film lent et prévisible, finalement à l’image de son personnage principal : mou, insipide et larmoyant.

Titre original : Pour une femme

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