Hitler à quatre pattes dans son bureau en train de faire le chien, une image qu’on ne trouvera jamais dans aucun livre d’histoire. Le film raconte la dépression du leader nazi qui a perdu sa rage de vaincre et sa haine des Juifs, d’où l’inquiétude de ses collaborateurs qui décident de faire appel à un artiste juif interné pour le remettre en selle.
Aussitôt dit aussitôt fait, la psychanalyse de choc est lancée. Mais Grünbaum n’a pas l’intention de se laisser utiliser sans tirer profit de la situation. Au programme des réjouissances, séance d’humiliation du Führer et postures plus ridicules les unes que les autres. Et ce qui devait être une introspection sérieuse finit par devenir un jeu grotesque.
Le film dévoile une facette d’Hitler que bien des gens ignorent, celle de l’homme sous la carapace du tyran. Un enfant battu et frustré qui a vu ses rêves s’éloigner peu à peu. Cette humanisation du « monstre » a quelque chose de gênant : comment cet homme qui est à l’origine de la souffrance de tout un peuple peut-il avoir quoi que ce soit à voir avec nous ? Ce concentré de cruauté apparaît finalement comme un homme blessé qui a mis en œuvre une horreur à la mesure de sa souffrance.
Tout au long du film, les tendances sont inversées, Hitler qui déteste les Juifs finit par parler de son tuteur comme d’un ami, son ami le plus proche même, si tant est qu’il en ait eu. Et de son côté, ce Juif a le sentiment de trahir ses semblables et change d’attitude. Lui qui souhaitait au début profiter de la situation pour sauver sa famille, ses amis et les autres victimes avant de tuer le chef d’orchestre de cette horreur, en vient à s’attacher à cet homme, à ses blessures intimes, au point même d’avoir envie de le sauver.
La construction cyclique ne gâche rien au plaisir; bien au contraire, elle alimente la question « Mais qu’est ce qui s’est passé ? ». La mise en scène, qui utilise souvent le comique de situation, permet de jeter un autre regard sur les us et coutumes qui organisaient la hiérarchie de ce système. Qu’il s’agisse du salut hitlérien, de la grandeur de l’armée, des différents grades des acteurs de cette tuerie, rien n’est oublié.
Détruire la magnificence du régime nazi et changer l’image du Führer, objectif atteint, le pari était risqué car le rire n’est pas la première réaction lorsqu’on évoque l’horreur des camps et de la Shoah.