Mensch

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Décousu et mou, Mensch brosse le portrait d´un trentenaire paumé, délinquant au grand coeur. Décevant.

Sam n’est bon à rien, sinon à casser du coffre-fort. C’est en tout cas ce dont il est persuadé, bien que sa famille tente incessamment de le ramener dans le droit chemin, celui des hommes honnêtes et simples. A 35 ans et père célibataire, il mûrit et décide de participer à un dernier cambriolage, avant de devenir un homme digne, un mensch.

On voulait y croire. Un grand sujet, un réalisateur-acteur et une distribution rassemblant vieux de la vieille (Maurice Bénichou, Sami Frey), héros charismatique (Nicolas Cazalé) et second rôle inattendu (Anthony Delon) promettaient une histoire de rédemption teintée de tragédie familiale et de truanderie, des thèmes dont on connaît le potentiel dramatique.

Mais là où Francis Ford Coppola, James Gray ou Jacques Audiard se sont brillamment illustrés, Steve Suissa se perd. Comédien, issu du théâtre, le réalisateur de Mensch gâte son film par un propos télescopique qui suit de près ses personnages mais oublie de fait leurs vies intérieures. Fantômes sans motivations, aux affections possessives voire monomaniaques, les protagonistes plombent le film de leur psychologie trop succincte. Tristement, le seul sentiment suscité chez le spectateur l’est par l’agaçant Youval, brute mal dégrossie que l’on intègre bien volontiers dans le palmarès des personnages les plus irritants de l’histoire du cinéma.

Toujours maladroitement, le script tente parfois de remédier à ces lacunes par des pirouettes scénaristiques plus faciles et incohérentes les unes que les autres. La jalousie de Youval (encore lui), sa cocaïnomanie et son agressivité n’ont d’égal dans l’outrancier et le n’importe quoi que la facilité avec laquelle l’histoire fait l’impasse des mobiles qui animent le personnage principal. On aura beau y réfléchir encore et encore, on ne comprend pas. Pourquoi doute t-il tant ? Pourquoi et comment est-il devenu un casseur de coffres hors pair ? Pourquoi n’est-il pas un « mensch », comme tous les hommes du clan Hazak?

Le seul élément de réponse plausible est la figure du père, dont l’absence et la méconnaissance privent Sam d’un repère moral immédiat et auquel se substituent le grand-père et l’oncle tandis que la femme, mère pathétique ou amante exigeante, est reléguée au second plan. Mais sans cette clé de voûte suffisamment bien construite et exploitée, le film s’écroule.

Malgré ses acteurs – globalement tous très bons – et le charme d’un Paris populaire, 1h27 de film et des idées passionnantes n’auront donné lieu qu’à une réflexion superficielle sur l’identité, la dignité, les rapports père-fils. Dommage.

Titre original : Mensch

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Durée : 87 mn


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