Livre « Almodóvar, les femmes et les chansons » de Jean-Max Méjean

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Un << texte d´impressions >> qui éclaire l´oeuvre du cinéaste et l´homme de manière très personnelle, sans être absolument une découverte.

Quelques jours après la fin du 64e Festival de Cannes – le énième à ne pas décerner de récompense à Pedro Almodóvar, qui présentait cette année La piel que habito –, ce livre de Jean-Max Méjean – son second sur le cinéaste, en librairie depuis début avril –, tombe à pic, rappellant à quel point la filmographie du maître espagnol est chatoyante, délurée et inimitable. Sept ans après Pedro Almodóvar (1), ce second opus se veut « pointilliste, pas pointu », précise l’auteur au fil de sa conversation. « Pointilliste, pas pointu », cela signifie que l’ouvrage va et vient entre des analyses soutenues sur l’utilisation par le cinéaste de la musique – des chansons plus particulièrement – dans ses films et des réflexions tout à fait personnelles, alliant parfois la rêverie au fantasme, l’auteur n’a pu, en dépit de ses efforts, rencontrer le cinéaste, ni aucune des actrices icônes de ses films.

Pour le novice saisir toute l’ampleur des propos de Jean-Max Méjean ne sera pas forcément chose aisée, là où, à l’inverse, pour quiconque connait un minimum le cinéma de la star de la Movida, l’ouvrage permettra de replonger avec plaisir dans cette filmographie où, en effet, les femmes et les chansons sont omniprésentes. Cette thématique n’est donc pas tout à fait une découverte, l’image de Penelope Cruz chantant dans Volver en étant même l’une des meilleures illustrations.

Quoique, reconnaissons que lorsque l’on parle des femmes chez Pedro Almodóvar, et l’auteur le dit avec justesse, il est souvent surtout question de la figure maternelle. Figure qui peut ensuite dévier, car la femme ne l’est pas toujours originellement, comme dans par exemple Talons aiguilles ou La loi du désir, film dans lequel Carmen Maura interprète un transsexuel, quand un véritable transsexuel, Bibi Andersen, interprète lui le rôle de la mère… La mère, la femme, occupent aussi un double rôle au sein du foyer, celui de l’homme et de la femme, faisant face seule. Jean-Max Méjean explique ainsi qu’Almodóvar s’amuse à faire éclater « la structure familiale traditionnelle ». En témoigne cet extrait des conversations qu’il a eues avec Frédéric Strauss (2) : « Il est possible maintenant de créer une famille avec d’autres membres, d’autres relations, d’autres relations biologiques. Et les familles doivent être respectées quelles qu’elles soient, car l’essentiel c’est que les membres de la famille s’aiment. »

Au-delà des femmes et des chansons, ce livre tourne autour du cinéaste, sa vie privée, ses déclarations dans la presse, sur son blog… pour dresser un aperçu de l’homme. Un homme que l’auteur, très admiratif, semble placer au sommet, parlant ainsi plusieurs fois de la flamboyance du cinéaste, de son « culot », dont « hélas nos jeunes réalisateurs français (…) sont pour l’instant dépourvus ». Plus amer, il sort aussi de l’étude pour entrer dans l’intimité de sa relation avec le cinéaste, ou plutôt de sa non-relation, puisqu’il n’a encore jamais pu rencontrer « le petit homme de la Mancha ».

Si le livre égare parfois le lecteur par ses multiples comparaisons ou références, il parcourt toutefois l’œuvre du cinéaste avec légèreté, donnant très envie de voir ou revoir les films de Pedro Almodovar (et d’autres ici cités : Louis Malle, Federico Fellini…) et d’écouter les chansons qui les habitent, éclairées d’une interprétation personnelle et parfois nouvelle. Jean-Max Méjean regrette d’ailleurs qu’un CD musical n’accompagne pas son livre. Pour cette raison, entre autres, ce « texte d’impressions » n’est pas à dévorer d’une traite, mais bien à savourer, entre deux écoutes, entre deux séances…

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(1) Pedro Almodóvar Éditions Gianni Gremese.
(2) Frédéric Strauss. Conversations avec Pedro Almodóvar. Paris, Les Cahiers du cinéma.


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