Le Temps de la kermesse est terminé

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Une réflexion cynique et didactique sur les rapports malsains qu’entretiennent souvent les Africains et les Français. Il y a des vérités qui dérangent, dit-on. Certains en feront l’expérience avec « Le Temps de la Kermesse est terminé » de Frédéric Chignac.

Une panne de voiture et c’est le chaos. En tout cas pour Alex, un Français bloqué dans le village de Koupala, au milieu d’un désert africain. Dans la petite localité, « le Blanc », comme souvent sur des territoires minés par la pauvreté – et ils sont nombreux en Afrique –, est accueilli comme un demi-dieu. Ses capacités financières et l’espoir d’une vie meilleure, qu’il incarne, font de lui une sorte de proie plus ou moins soumise à l’avidité du village. Alex compte bien résister face à ces Africains dont il pense avoir percé le fonctionnement et use à l’envi de son pouvoir. Il sera cependant mis à rude épreuve par quelques résistances locales.

Le propos de Frédéric Chignac est simple : il a construit une métaphore cinématographique des relations entre les Occidentaux – plus précisément les Français – et les Africains. Les premiers, dominant les seconds de façon tacite, du moins en apparence, font preuve de condescendance, se permettant de leur faire la leçon. Dans le village, Alex veut par exemple à tout prix connaître l’histoire du « banni », est même prêt à tout pour que le jeune homme lui raconte son histoire. Comme si c’était un dû. Le cynisme (quasi naturel) de l’humoriste Stéphane Guillon sert au mieux le personnage. Ce dernier apprendra néanmoins au cours de ce séjour qui s’éternise à faire profil bas. Notamment quand il est confronté au lieutenant Bado, un officier qui a fait ses études en France et  tient à lui démontrer que le temps où les Blancs étaient les maîtres absolus est définitivement révolu. 

Le Temps de la kermesse est terminé
est un huis clos pesant et étouffant à plusieurs niveaux. Alex est enfermé dans la case qu’il loue, n’a d’autre choix que d’aller boire des bières dans le seul bar du village ou d’aller vainement demander de l’aide dans la caserne voisine. Au total, son champ d’action se limite à Koupala. Cet enfermement, responsable de la monotonie qui tout en servant l’intrigue du long métrage plombe la narration, est aussi ressenti dans sa relation avec Martina. La jeune femme fait figure d’agneau sacrifié sur l’autel de la survie du village. En gagnant les faveurs du Blanc, elle pourra tenter de rejoindre l’Europe et aider ses compatriotes. Le mirage de l’immigration salvatrice. La jeune femme, rendue étonnamment crédible par Aïssa Maïga, vue récemment dans Ensemble c’est trop, est butée, comme seuls savent l’être ceux qui se sont résignés : il n’est pas question de lâcher Alex.

Chignac met assez bien en scène la misère et les compromis auxquels elle contraint les individus, lot quotidien de nombreux Africains. Il souligne aussi la nécessité pour leurs partenaires occidentaux d’apprendre à se défaire de leurs préjugés. Le petit garçon qui sert d’homme à tout faire à Alex et que ce dernier considère comme attentiste n’hésite pas à prendre le chemin de la mine pour aider sa famille. On sent alors le respect de l’adulte pour cet enfant qui a trop vite grandi.

Pour ceux qui savent à quoi s’en tenir en ce qui concerne les rapports entre la France et ses anciennes colonies, Le Temps de la kermesse est terminé ne sera pas une révélation. Mais le film est en revanche une bonne entrée en matière pour les non initiés – dont la majorité se trouve (naturellement) en Occident –, une belle occasion de faire face à cet univers impitoyable.

Titre original : Le Temps de la kermesse est terminé

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Durée : 110 mn


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