DVD « La Brindille »

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Entre petites échappées fictionnelles et ancrage documentaire, ce modeste premier film vaut le coup d´oeil.

De facture très modeste, le premier long métrage d’Emmanuelle Millet a pour principale qualité de savoir ce qu’il veut : rien de plus qu’accompagner son personnage dans une étape précise de sa vie, puis le laisser poursuivre sa route sans rien dire, sans symbolisme superflu. Ainsi La Brindille parvient à toucher peu à peu par sa linéarité, le tracé sans ornements d’une chronique post-adolescente comme on en a certes vu des tonnes dans le cinéma français, mais qu’il serait ici bien étrange de moquer.

Soit trois mois de la vie de Sarah, 20 ans, « la brindille » (Christa Théret, touchante dans ce premier rôle adulte), apprenant, alors qu’elle peine à trouver du boulot, qu’elle est enceinte de six mois. A partir de là, passé le choc de la découverte (sachant que son corps n’est à cette heure pas du tout celui d’une femme enceinte, symptôme premier du déni de grossesse), admise l’idée qu’il est de toute manière trop tard pour l’avortement, quelle direction choisir, sur quelles épaules s’appuyer ?

Celles des autres filles de l’établissement pour jeunes mères qui l’accueille, mais dont elle peine à se sentir proche (il faut au passage avouer que le film ne permet pas vraiment à ces seconds rôles d’exister au-delà de leur hostilité envers Sarah) ? Celles de la directrice de l’établissement, sévère mais maternelle (Anne Le Ny) ? Celles d’un bel étudiant (Johan Libéreau), qu’une histoire familiale douloureuse motive à vouloir partager avec elle la charge de cet enfant à venir ? Ou alors les siennes propres, celles d’une jeune femme consciente de n’avoir pas en ce jour les moyens physiques, psychologiques, économiques d’assurer ce rôle de mère ?

C’est autour de ces diverses potentialités que tournera le récit, la cinéaste accordant à son personnage le temps nécessaire à la réalisation de sa situation à la fois singulière et si commune. Entre besoin de se sentir encore un peu adolescente et s’abandonner sans questionnement à ses désirs immédiats (faire l’amour, bouger, ne vivre que pour elle) et conscience permanente que de toute manière, dans quelques semaines, quelques heures, il faudra bien faire face à une réalité, celle de l’accouchement, mais aussi du choix de confier ou non cet enfant à une vraie famille, Sarah devient peu à peu une petite héroïne de tous les jours.

Si, en termes de dessin d’une trajectoire individuelle, La Brindille est très loin d’avoir l’ampleur existentielle d’un film de Mia Hansen-Løve, le film, par son juste dosage entre échappée fictionnelle et ancrage documentaire, accède de loin en loin à une grâce fragile mais bien réelle.

Bonus

T’as un rôle à jouer !, court et réjouissant documentaire accompagnant durant un an Mathieu Amalric, lors de l’animation d’un atelier de cinéma auprès d’enfants du secours populaire de Clermont-Ferrand.

Mon ange, film de deux minutes réalisé dans le cadre d’une collection de courts consacrée aux violences conjugales.

Les commentaires du tournage par Emmanuelle Millet.

Edité chez Ad Vitam.


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