« Éducation, éducation ! On peut maîtriser ce qu’on veut. »
Whit Stillman excelle dans la description des personnages et les idées de génie : de l’attardé qui ne parvient à identifier les couleurs, traumatisé par les arcs-en-ciel – et par extension par les manifestations gays – à l’enfoiré affectif qui saoule sa jouvencelle de petite amie de références françaises pour la mettre dans son lit, Damsels in Distress est parfois farouchement drôle. Le réalisateur a d’ailleurs l’intelligence de ne pas verser dans l’angélisme pour ses quatre héroïnes. Au contraire, la caricature est appuyée et Stillman pointe leurs travers du bout de la caméra. De leur emprise réactionnaire (le doux souvenir des 50s) à leur condescendance affichée (sortir avec des débiles pour les aider à se parfaire), Stillman ne les loupe pas. Si on ne fait pas d’omelettes sans casser des œufs, manifestement on ne peut pas changer le monde qu’avec de bonnes intentions. Et même le rachat express de la leadeuse Violet (remarquable masque de cire Greta Gerwig) à base de caractérisation psychologique et de flashback mélodramatique explose en plein vol par la bêtise de son amoureux transi (Adam Brody mièvre à souhait).
Tant de promesses et de fils tendus sont difficiles à faire tenir ensemble. Le film ne pêche pas par un finale moralisateur comme dans la majorité des teen movies, mais parce qu’il ne sait pas vraiment comment clore son conte. Péché mignon de la comédie contemporaine, et donc trop souvent vraie afféterie, c’est le basculement dans la séquence musicale mi-libération de l’imaginaire, mi-second degré (en soi elle poursuit la caricature engagée par le film) qui est choisi. Une facilité dont on se serait bien passé et qui entache ce portrait pourtant lucide et réaliste des relations humaines et ses dialogues qui confinent parfois au génie.