Cannes Jour 8: Femmes au tapis

Article écrit par

« Tout, tout, tout, vous saurez tout sur les films d´Un certain regard. Les courts, les longs, les Mexicains. Les drôles, les ennuyeux et les Roumains. » (A chanter!)

Les discussions cinématographiques des festivaliers s’époumonent presque uniquement sur les films de la Compétition officielle. C’est humain, tout le monde veut donner son avis sur Tree of Life ou Melancholia et préfère se concentrer sur les films de réalisateurs reconnus, il est de ce fait compréhensible de ne jamais entendre dans les rues cannoises: « T’en as pensé quoi du dernier Gerardo Naranjo ? » Voilà tout l’intérêt de la sélection Un certain regard qui offre à des réalisateurs comme Naranjo (Miss Bala) une visibilité précieuse et judicieuse à leurs films devant une horde de spectateurs cinéphiles bronzés (ou rougis, selon votre peau).

Un unique point commun entre tous ces films sélectionnés venus de quatre coins du monde et du Nord de la France, ils ne disposent d’aucune prétention. Les équipes techniques et artistiques sont émues voire gênées des applaudissements fougueux ou polis qu’ils reçoivent et c’est un réel plaisir de les voir appréhender la réaction du public cannois. Bon, il est vrai qu’il ne serait pas très fin de la part d’un réalisateur obscur néo-zélandais de monter sur scène pour présenter son film en triomphant de la sorte :« Mon film est le meilleur. Je suis un génie ». Cependant, cette timidité ambiante reste rafraîchissante dans ce Cannes légèrement bling-bling. En évitant les incertains regards, intéressons nous d’abord à Miss Bala, film mexicain sur une prétendante à une élection régionale de Miss qui se retrouve mule de trafiquants. L’avantage de présenter des films de tous horizons est la possibilité de comprendre chaque spécificité de chaque pays et de leur société. On constate un Mexique corrompu, aux mains liées par les chaînes de la mafia dont la question sur la condition féminine est absolument inexistante. Cette négation de la femme est symbolisée par la longue séquence de l’élection de Miss où l’héroïne du film remporte la couronne malgré ses pleurs à la question « Que voulez-vous faire plus tard ? » et les bleus qu’on lui a soigneusement maquillés avant de défiler en bikini.

 
Sacré Graal + Tournée = Et maintenant, où va où ?
Autre ambiance plus caustique mais même thématique féministe dans Et maintenant, où va où ? de Nadine Labaki qui s’intéresse au conflit religieux de son pays, le Liban. Dans un petit village, la tension monte entre Musulmans et Catholiques alors que vraisemblablement tout le monde s’aime. Et ce sont les femmes qui utiliseront ruses et illusions pour limiter les dégâts et éviter que le village perdent une nouvelle fois ses hommes. Bourré d’humour destructeur et poétique, le film a fait chavirer la salle de projection par sa séquence de comédie musicale où les femmes du village décident de faire des beignets au haschich accompagnées par des strip-teaseuses ukrainiennes complices pour détendre l’atmosphère. Tout en se moquant intelligemment des contraintes religieuses, Labaki finit son film par une lueur d’espoir mais teintée de tristesse en unifiant les deux cimetières religieux de la ville en enterrant un gamin du village.

 

Martha Marcy May Marlene est le Blue Valentine de cette année. Un premier film américain indépendant touchant et trébuchant au montage ambitieux et réussi. Cette fois-ci, Sean Durkin filme l’histoire d’une jeune écorchée fuyant une ferme sectaire et hébergée par sa sœur dans une grande maison « à l’Américaine ». On revit le processus d’aliénation mentale subtile qu’a subi le personnage principal (Elisabeth Olsen, actrice à suivre) pendant qu’elle se confronte à son nouvel environnement. Malgré quelques manques dans l’histoire permettant un adoubement total devant un tel objet de cinéma intuitif et pertinent, le film évoque humblement un cinéma américain peu présent à Cannes cette année.

Et sinon The Tree of Life est bouleversant, les mojitos de la villa des Inrocks sont excellents et La Conquête semble faire un flop…

Précédemment, dans notre saga cannoise:
Quand Cannes fait son 64e festival
Cannes Jour 1 : Les choses sérieuses commencent
Cannes Jour 2 : Des salles obscures à la plage
Cannes Jour 3 : We need to talk about Nikos !
Cannes Jour 4 : A Starr is born
Cannes Jour 5: On se foule!
Cannes Jour 6: Lundi sous le soleil cannois
Cannes Jours 7: Fier d’être Français


Partager:

Twitter Facebook

Lire aussi

Niki

Niki

Trois ans après son court-métrage Adami, « L’arche des Canopées », Céline Sallette revient à Cannes et nous confirme qu’elle fait un cinéma de la candeur.