Cannes 2011 : bilan du Festival

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Le 64e Festival de Cannes s’est terminé dimanche dernier avec une Palme d’Or pour Terrence Malick et quelques surprises. On décortique les résultats !

La cérémonie de clôture du 64e Festival de Cannes à peine digérée, il est temps de faire le bilan, calmement, en se remémorant chaque instant d’une édition réussi et riche en propositions. On range sereinement le nœud papillon qu’on arbore chaque année sur les marches, on recommence à manger sainement (le Festival de Cannes étant le meilleur régime au monde puisqu’on y mange…rien) et on se réhabitue avec tristesse à payer l’alcool que l’on consomme. Au revoir, coupes de champagne offertes matin, midi et soir, on se sera bien amusées ensemble pendant une dizaine de jours…

Cérémonie de clôture

Sobre, lucide et apaisé, nous pouvons commenter le palmarès décerné par Robert De Niro et son jury. Première impression générale : aucun scandale, malgré bien sûr quelques interrogations. Cette année encore, la Palme d’or ne fait pas l’unanimité chez les festivaliers mais a l’avantage de féliciter l’œuvre la plus cinématographique de la Compétition. Terrence Malick transpire le cinéma et voir The Tree of Life remporter la récompense suprême semble être de toute logique. Certes, certains trouveront que l’ambition du film n’est que prétention, que sa réflexion et ses images oniriques ne sont que boursouflage insensé. Mais peut-on vraiment qualifier Malick de prétentieux ? Cet homme qui, modestement, ne vit qu’avec sa caméra et son couteau serait devenu tout à coup une arnaque du cinéma ? On peut cependant s’interroger sur le sort de Melancholia si son auteur n’avait pas tenté d’imiter Dieudonné en conférence de presse. Le film a bouleversé et le voir repartir avec la Palme n’aurait choqué personne. En conséquence de l’exclusion de Lars Von Trier, c’est Kirsten Dunst qui se trouve généreusement récompensée. Son prix d’interprétation féminine n’est pourtant pas usurpé, même si on a une petite pensée pour Tilda Swinton et sa composition incroyable dans We have to talk about Kevin, peut être présenté trop tôt en début de Festival.

Le triomphe de Jean Dujardin peut paraitre comme une surprise mais elle ne l’est point, tant The Artist a conquis la presse française et surtout étrangère. Et pourtant, les concurrents étaient nombreux. On peut citer Sean Penn pour This must be the place de Paolo Sorrentino ou Ryan Gossling pour Drive et surtout Michel Piccoli pour son rôle de Pape en plein doute d’Habemus Papam (si l’égo de Moretti lui avait laissé un peu plus de place). On peut aussi évoquer Joey Starr, qui récoltera sûrement un César l’année prochaine pour son rôle de flic tourmenté dans Polisse, le film de Maïwenn, qui récupère avec bonheur le Prix du Jury. La cuvée 2011 est tellement exquise que ce palmarès engendre forcément des déceptions. Aucune récompense pour Le Havre de Kaurismäki ou Habemus Papam. Comme le veut cette étrange tradition, Pedro Almodóvar rentre chez lui les mains vides, même si La Piel que Habito semblait avoir séduit le plus grand nombre. Gardons le meilleur pour la fin : on ne peut que se réjouir du Prix de la mise en scène pour le danois Nicolas Winding Refn, récompensant un film de genre stylisé qui nous fera oublier quelques heures les thèmes pesants et métaphysiques de la plupart des films en sélection.

En ce qui concerne la sélection « Un certain regard », le jury présidé par Emir Kusturica a décidé d’offrir le prix à deux films : Arirang, réflexion émouvante du Coréen Kim Ki-Duk et le pénible Halt Auf Freier Strecke de l’Allemand Andreas Dresen. Un choix surprenant au vue des succès en projection du rafraichissant The day he arrives de Hong Sang-soo, du flamboyant Et maintenant on va où ? de Nadine Labaki, du surprenant Hors Satan de Bruno Dumont et du favori L’exercice de l’Etat de Pierre Schoeller, dont, à n’en pas douter, on reparlera énormément à sa sortie.

C.Z.

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Décryptage des films proposés

Le 64e festival de Cannes a présenté en Compétition vingt films, souvent des drames, parfois des long-métrages d’action ou à suspens, une ou deux comédies. Au-delà du genre des films, on observe une récurrence de certains thèmes : la mort, l’univers, l’enfermement, le sexe. Retour sur la sélection officielle, mais aussi les bonnes surprises de cet événement, clôturé comme chacun sait avec une Palme d’Or pour Terrence Malick.

Dix jours au cours desquels les professionnels du cinéma, que se soit la presse, les producteurs, réalisateurs mais aussi les cinéphiles ont pu se plonger dans des atmosphères parfois récurrentes. La première d’entre elle : l’Univers, la dimension donnée à l’Homme face à la Nature. En premier lieu The Tree of Life de Terrence Malick, récompensé donc par le jury, qui fait le parallèle entre l’Homme et l’Univers, les choix de vie, leurs conséquences sur l’Humanité. Par la succession de plans d’étoiles, de cosmos, de magma mais aussi d’arbres, de volcans, Terrence Malick rejoint en ce sens Melancholia de Lars von Trier. Les deux réalisateurs – que tout oppose pourtant – ont voulu montrer dans leurs films respectifs que l’Homme n’est rien face à tant d’Espace, d’Histoire, de Temps. Sans faire de spoiler, Charlotte Gainsbourg et Kirsten Dunst, deux sœurs dans le film de Von Trier, sont unies jusqu’à la mort face à une planète qui s’approche dangereusement de la Terre. Loin d’être moralisateur, le Danois tente dans cette scène finale de montrer ce que peuvent ressentir, de manière différente, deux êtres avant la fin.

Mort qui fut omniprésente dans la compétition officielle. Le vice a même été poussé jusqu’à la torture, la souffrance face à la mort. Non seulement dans The Tree of life, dans Melancholia, mais aussi dans L’Apollonide, souvenir d’une maison close où l’une des prostituées connait « Le sourire du Joker », une coupe des lèvres et des joues par un aristocrate venu prendre un plaisir sadique. Ce personnage, nommé « La Juive », est le plus intéressant du film. Non seulement il véhicule une image nouvelle des bordels et des amusements de la bourgeoisie à cette époque mais l’actrice, Alice Barnole, est la révélation du film, y incarnant avec élégance la souffrance, le bizarre, le « monstre ». Merveilleuse interprétation de la part de cette actrice d’à peine 25 ans, rousse à l’origine.

En parlant de bordel, on parle évidemment de sexualité. Dans L’Apollonide, Bonello use de plans découpés en double split-screen (quatre parties), pour illustrer les scènes de sexe. Dans le film d’Almodóvar, La Piel que Habito, c’est deux scènes de viols qui sont montrées, sans outrage mais plutôt pour dynamiser l’action, montrer le mal, la punition. Pour Lars von Trier, le sexe correspond à l’adultère, la folie. Alors que dans La Source des femmes de Radu Mihaileanu, le sexe, l’amour physique est le centre d’une pression exercée par les femmes envers les hommes, qui deviennent nerveux lorsqu’ils sont en manque. Autrement dit, peu de sexe et d’amour confondu, mais une dure réalité charnelle, tantôt pression, tantôt crime.

D’une année à l’autre, le festival de Cannes présente des films aux thématiques divergentes. Pour ce 64e festival, la sélection officielle se voulait donc glauque, sombre, provocatrice, avec quelques originalités : The Artist de Michel Hazanavicius, film en noir & blanc et muet avec Jean Dujardin et Bérénice Bejo dans des rôles drôles et très expressifs, This must be the place de Paolo Sorrentino, avec Sean Penn totalement métamorphosé en rockeur maquillé, Le Havre d’Aki Kaurismäki, avec ce côté vintage à la française, théâtral et tendre. Bref, une seule idée persiste dans nos esprits : vivement l’année prochaine pour que cela recommence !

 
S.C.


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