Surprise, la grande apothéose super-héroïque promise tient toutes ses promesses.
The Avengers constitue un premier aboutissement de l’ambitieux projet de Marvel qui cherchait à reproduire au cinéma ce qui est une chose commune et acceptée dans l’univers des comics : un univers étendu où différents super-héros se connaissent, se côtoient et peuvent autant s’entraider que s’affronter. On rappelle les faits. Las du traitement parfois désinvolte (les mauvais Quatre fantastiques, Daredevil ou encore Ghost Rider) infligé par les studios à ses héros de papier, Marvel décide de créer sa propre structure cinéma où il produirait et superviserait les adaptations de ses personnages. Le premier film issu de cette logique sera Iron Man de Jon Favreau. Pas exempt de défauts, le film est néanmoins une belle réussite et un grand succès au box-office grâce à la prestation épatante de Robert Downey Jr. En forme de clin d’œil calculé aux fans, une séquence post-générique voit le héros Tony Stark contacté par le mystérieux Nick Fury (Samuel L. Jackson chef de l’organisation du SHIELD concernant le projet Initiative). Hulk, le film suivant produit par Marvel (après l’aventureuse mais ratée tentative d’Ang Lee quelques années plus tôt) glissera à nouveau une saynète de ce type en fin de générique et tout aussi bien accueillie par les fans. Il est alors annoncé que les prochains films Marvel serviront d’introductions aux membres des Avengers, mythique équipe de super-héros bien connue des lecteurs de comics. Suivront donc le Thor de Kenneth Branagh, Captain America de Joe Johnston et un second Iron Man.
Plusieurs constats s’imposent au fil des films. Ce sont avant tout des œuvres de producteurs cherchant à créer et à uniformiser un monde cohérent plutôt qu’à laisser émerger la personnalité du réalisateur, du coup ce sont plus des authentiques faiseurs (Joe Johnston, Jon Favreau voire Louis Letterier et son Hulk) que viendront les films les plus efficaces quand un auteur comme Kenneth Branagh délivrera un résultat plus qu’inégal (épatant de grandiloquence assumée lors des scènes à Asgard, quelconque et poussif dans les passages sur Terre) avec Thor. Ainsi chapeauté de près, les films sont rarement mauvais mais n’atteignent jamais l’excellence d’un Spider-Man 2 ou d’un X-Men et plus inquiétant les meilleurs sont ceux s’astreignant le plus de cette continuité (voire le grand brassage de vide du raté Iron Man 2). On pouvait donc craindre le pire du tant attendu film réunissant enfin tout ce petit monde avec l’inexpérimenté Joss Whedon aux commandes. Après les réussites télévisuelles que furent Buffy contre les Vampires et son spin-off Angel le passage au cinéma s’était avéré quelconque avec Serenity, space opera aux allures de téléfilm concluant sa série avortée Firefly. Pourtant l’ensemble s’avère très vite prenant grâce à la rigueur narrative imposée par l’excellent scénariste qu’est Whedon.
Malgré un rythme un peu boiteux (réintroduire tous les personnages, définir les enjeux et rendre l’ensemble compréhensible à qui n’a pas vu tous les films précédents), la première partie s’avère ainsi un modèle d’introduction. Largement prouvé dans Buffy, Whedon laisse à nouveau éclater son talent pour introduire chaque personnage de manière limpide et dynamique, redéfinir les fêlures de chacun explorées dans les autres films (ou carrément les présenter intelligemment dans le cas de la Veuve Noire) et amener progressivement la dissension puis la dynamique d’équipe. Chaque personnage sera idéalement mis en valeur et aura son moment héroïque et intimiste parfaitement intégré à l’ensemble : Tony Stark entre narcissisme autodestructeur et vrai héroïsme, Thor noble de cœur mais aux attitudes brutales ou encore Captain America, soldat dévoué mais décalé par rapport au monde moderne qui l’entoure. Robert Downey Jr., Chris Evans et Chris Hemsworth retrouvent les qualités d’interprétation de leurs films respectifs mais c’est le nouvel arrivé Mark Ruffalo qui s’avère le plus impressionnant (surclassant ses prédécesseurs Eric Bana et Edward Norton) en Bruce Banner/Hulk magnifiquement torturé. Scarlett Johansson humanise enfin la Veuve Noire qui n’était qu’une silhouette sexy dans les autres films et offre une relation attachante avec Jeremy Renner.
Ainsi mis en orbite, les exploits de nos héros n’en seront que plus palpitants lorsque l’action daigne se manifester. Le manque d’ampleur des scènes d’actions était également un des grands écueils des productions Marvel, très pingres en la matière. Toute la frustration accumulée des films précédents est ici résolue dans un fabuleux climax final de trente minutes. On ressent un souffle épique que l’on n’avait plus approché depuis la séquence du métro aérien de Spider-Man 2, Whedon accumule rebondissements et bagarres dantesques avec jubilation notamment avec un Hulk dévastateur. The Avengers naissent de ce moment où ils ploient sans se briser devant la menace, la finesse d’écriture de Whedon (le leadership de Captain America s’imposant de manière limpide dans l’action) et un sens visuel enfin maîtrisé les imposant triomphalement par un travelling circulaire iconique en diable. On n’attendait guère pareille réussite de la part de Marvel, mais le studio est enfin parvenu à croiser ses velléités de grandeur avec le talent d’un Whedon qui s’est avéré l’homme de la situation. Un des meilleurs blockbusters récent et prometteur pour une suite dont la scène post-générique rendra l’attente insoutenable aux amateurs de comics.
Par la satire sociale, cette comédie de moeurs tourne en dérision les travers de l’institution maritale. Entre Cendrillon et Le Roi Lear, la pochade étrille la misogynie patriarcale à travers la figure tutélaire de butor histrionique joué avec force cabotinage par Charles Laughton. Falstaffien en coffret dvd blue-ray.