Un Conte d’été polonais

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Après le succès de son premier film « Squint your eyes », Andrzej Jakimowski signe son deuxième long métrage avec « Un conte d´été polonais », déjà reçu avec enthousiasme par le public et la critique internationale.

Petit bijou, c’est le coup de cœur de cette rentrée, il faut le dire, un peu morose. Présenté début octobre en ouverture de la première Semaine du cinéma polonais à Paris (du 1er au 7 octobre 2008), ce film séduit par son originalité mais aussi par sa simplicité magnifique. Sorte d’hommage, en fait, au cinéma tchèque de la belle époque, Un conte d’été polonais, malgré son titre, n’a bien sûr rien de rohmérien, même si le clin d’œil n’est sans doute pas innocent. C’est plutôt vers le Truffaut des 400 coups qu’il faut aller chercher une sorte d’inspiration, ce cinéaste qui a si bien su filmer, entre autres, les enfants. Servi par une photographie sublime, le film raconte la vie de tous les jours en Pologne pendant un été du XXIe siècle. Stefek, 6 ans, a l’insolence de son âge et se fait le narrateur d’une quête quasi désespérée : celle de son papa qui a quitté le domicile conjugal. Partagé entre sa sœur et sa mère qui l’adorent, on sent bien que Stefek, avec ses yeux bleus candides, pose sur le monde un regard étonné et intelligent. Cet enfant comprend tout et reconnaît, même si on ne le lui concède pas, son père dans cet homme qui attend le train tous les matins dans la petite gare du village.

Stefek est donc à la recherche de la figure paternelle, et sans doute est-ce pour cette raison qu’il n’a de cesse de se placer entre sa sœur et son petit ami, sur la moto, la tête posée sur l’épaule de l’homme. Il cherche, comme pour comprendre les mystères du monde et du hasard, et la caméra le suit partout comme un troisième œil, dans les rues qu’il arpente sans trêve, comme s’il n’avait dans sa quête, quasi espionne, aucun répit, aucune halte, aucune respiration. Sorte de Respiro plus sobre, ce film rend des hommages discrets à tout le cinéma mondial, sans cuistrerie et tout en gardant sa personnalité. Ainsi, dans la séquence de la pêche, au moment où le père a raté le train par la faute involontaire et indirecte de son fils, on peut voir la tendre citation du film tchèque La carpe [Jiri Hanibal, 1964]. En effet, il est amusant de retrouver ce père en apparence si sérieux, désormais dépourvu de son attaché-case, déambuler dans les rues, les pantalons retroussés et son filet plein de poissons à la main. Car son fils, en cachette, lui tend de tendres pièges et détourne son chemin pour le ramener à la maison. Passionné de conduites magiques, chères à notre grand Federico Fellini [notamment Huit et demi], Stefek parvient peu à peu à comprendre mieux ce monde qui l’entoure, et à retrouver finalement l’amour de son père sur ce même quai de gare qui devient, du coup, le lieu de toutes les retrouvailles, comme pour exorciser les trains de la mort de la Shoah.

On l’a dit, ce film, en plus de nous dresser un tableau réaliste et cependant plein de poésie (sans mièvrerie aucune, ce qui aurait pu être la tentation) de la Pologne contemporaine, offre des rôles en or à des acteurs sublimes, comme le jeune Stefek bien sûr, mais aussi sa sœur, la mère, le père. Un film à ne pas manquer donc, qui parle plus avec des images et leurs silences, des couleurs et leurs contrastes, que mille discours lénifiants sur l’amour, le respect et l’espoir. « Autant de points qui font d’Un conte d’été polonais un film à part, écrit Aurélia Scheyé (Fémina, 1er octobre 2008), une œuvre qui sort des rails et qui file joliment à vitesse de croisière. Une chose est sûre, nous n’avons pas raté le train et avons savouré ce petit bout de chemin. »

Titre original : Sztuczki

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Durée : 92 mn


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