Roman de gare

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On le traitait de << has-been >> ? Qu´à cela ne tienne, Claude Lelouch a voulu montrer qu´il en avait encore sous le pied pour réaliser ce malicieux et vivifiant Roman de gare. L´éditeur Les Films 13 lui rend d´ailleurs hommage avec deux disques pleins à craquer.

Claude Lelouch, ou le zigoto du cinéma français, n´en finit pas de nous étonner. Il n´est pas rare que les critiques le clouent au pilori ou le vouent aux gémonies. Lui, tel le phénix, renaît sans cesse de ses cendres. Combien de fois ne l´a-t-on pas annoncé perdu, fini, notamment pour son avant-dernier film, Les Parisiens dont on ne verra pas la suite de si tôt paraît-il, obligé qu´il s´est cru d´abord de prendre le pseudonyme de Hervé Picard (en réalité, son ancien entraîneur de tennis) pour annoncer son dernier opus, puis en révéler à tous la paternité au moment de Cannes. Il n´empêche, même sans l´adorer, on peut quand même constater qu´il est le dernier cinéaste populaire français encore vivant et ce n´est pas rien, car le cinéma, cet art modeste, se doit avant tout d´intéresser le peuple, si tant est qu´on sache encore ce qui se cache derrière ce trop vaste concept.

Avec Roman de gare, on peut dire que Claude Lelouch nous revient en pleine forme avec un film du samedi soir, entre thriller et amourette, avec comme titre un pied de nez évident à la critique, venant de celui à qui on a souvent reproché une inspiration gentiment fleur bleue ou mièvre. Bref, assisté de Pierre Uytterhoeven, il nous livre ici un bon policier en reprenant la méthode du scénario alambiqué qui retombe toujours sur ses pattes. Les médias s´en sont chargés avant nous, du coup nous ne vous raconterons pas l´intrigue du film. On vous laisse découvrir les secrets mystérieux de cette histoire policière presque haletante. Comme si Alejandro Gonzalez Inarritu n´avait rien inventé, Claude Lelouch s´amuse à raconter une histoire abracadabrantesque où le suspense le dispute au roman de gare, et les considérations métaphysiques à un agréable jeu de séduction. On ne s´ennuie jamais et les situations sont toujours très bien rendues même lorsqu´elles flirtent avec l´invraisemblable : la coiffeuse putain et son improbable famille, la soeur du nègre d´un auteur à succès à la colle avec le flic chargé de l´affaire, le serial-killer qui a les même tics que ledit nègre, etc. Mais en fait, ça fonctionne parce que c´est ça toute la magie du film du samedi soir et, en ce sens, on peut dire que Lelouch a réussi son coup.

Entouré de grands acteurs, comme Dominique Pinon, Zinedine Soualem et Michèle Bernier, ce film a aussi le mérite de nous faire découvrir une grande actrice de théâtre, une jeune femme de 30 ans, Audrey Dana, que d´aucuns comparent déjà à Arletty. Il faut dire qu´elle assure dans un rôle qui n´était pas joué d´avance, puisqu´elle doit être à la fois hystérique mais pas trop, amoureuse mais pas toujours et vulgaire sans trop forcer la note tout le temps. Et aussi étrange que cela puisse paraître, elle y arrive surtout dans les scènes où elle est campée de sa fille de cinéma, la très jolie Shaya Lelouch, la fille de son père.

Enfin, the last but not the least, Fanny Ardant brosse ici le rôle d´une écrivaine névrosée, genre Mary Higgins Clark, auteur à très grand succès de nombre de polars, en réalité peut-être écrits par un nègre (vous me suivez ?). Fanny Ardant joue alors à merveille de son horripilant accent snob pour se tourner, qui sait ?, en dérision. Claude Lelouch ne donne pas ici son véritable chef-d´oeuvre, mais un film qui se tient bien. Et dire qu´il aurait pu ne pas le signer, à la manière de Romain Gary, en se faisant passer simplement et modestement pour le producteur.

Titre original : Roman de gare

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Durée : 103 mn


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